Aller au contenu

Page:Du Saussay - Perverse, 1896.djvu/177

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
171
PERVERSE

blancs et rouges, des turcos tout bleus rayés de rouge au ventre, des marsouins gris comme l’ombre, des matelots élégants et sveltes, des cuirassiers, des dragons, des lignards, des chasseurs, des autres encore passaient vite et disparaissaient. Paula savourait le plaisir qui dormait dans tous ces jeunes gens, aux bras solides, aux reins carrés, et, les yeux fermés, à tour de rôle, elle les voyait, elle les sentait ses amants, elle les aimait tous, elle les désirait et, à tous, elle se donnait la nuit suivante ; en rêve.

Un matin, droite contre la vitre, elle guettait les passants, les soldats, ses amants. Elle vit tout à coup, traversant la rue, un zouave, grand, corseté dans l’azur de sa ceinture. Il était plus beau, plus crâne que tous les autres. Blond, étrangement, le visage bronzé, les épaules larges, les pieds petits serrés dans des guêtres très blanches, d’allure aisée et féline, cachant l’habituelle cadence dans cette grâce que donne aisément les plis amples de l’étoffe, il la vit qui le regardait.