Aller au contenu

Page:Du danger des mauvais livres et des moyens d'y remédier.djvu/128

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
126

vent exposée à tomber dans les plus grandes extravagances. « Montrez toujours les boyaux des gens qui meurent, disait Moïse Millaud aux romanciers du Petit Journal, c’est une esthétique comme une autre. » Ah ! si tous ceux qui tiennent une plume se disaient qu’après tout ils ont charge d’âmes, ils n’auraient pas aussi souvent l’occasion de lire le récit des crimes si abominables dans les faits-divers des journaux ! Le mal que répand la petite presse est incalculable.

« J’avais, écrit Raymond Berthier, un bon vieux grand-père, naïf quoique profondément remarquable, qui n’était point sorti de sa province et qui me disait après la lecture d’un roman de Ponson du Terrail :

« Voilà ce qui arrive dans le feuilleton : un homme qui veut se débarrasser de son ennemi s’en va tremper dans un charnier une aiguille en pleine chair d’une bête morte du charbon et pique ensuite cette aiguille dans le fauteuil où doit s’asseoir celui qu’il déteste et qui périra d’infection charbonneuse. Eh bien, on me dira ce qu’on voudra, mais au fin fond du cœur, l’homme, l’auteur qui est capable d’inventer une pareille machination n’est pas un honnête homme. »