Page:Du halde description de la chine volume 1.djvu/226

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

du monde. Mais celles de Nan king ont été bâties étroites, et ne paraissent pas avoir été meilleures que celles de l’ancienne ville de Peking qui ne valent pas mieux que les murailles des villes ordinaires des provinces.

On peut monter à cheval sur les murs de la nouvelle ville, par une rampe qui se prend de fort loin. Il y a en plusieurs endroits des maisons pour les corps de garde ; les tours sont à la portée de la flèche ; on en trouve, après un certain nombre, de beaucoup plus grandes, où l’on peut placer de petits corps de réserve.

Les portes de la ville hautes et bien voûtées portent des pavillons extrêmement larges et à neuf étages, chacun percé de fenêtres ou de canonnières. L’étage d’en bas forme une grande salle, où se retirent les soldats et les officiers qui sortent de garde, et ceux qui doivent les relever.

Devant chaque porte on a laissé un espace de plus de trois cent soixante pieds, qui fait comme une place d’armes, entourée d’un demi cercle d’une muraille, dont la hauteur et la largeur sont égales au reste de l’enceinte, dans laquelle on entre toujours par celui des côtés qui n’enfile pas le grand chemin par où l’on vient de dehors. Ce chemin est encore dominé par un pavillon semblable au premier, de sorte que si le canon de celui-ci peut ruiner toutes les maisons de la ville, le canon de celui-là bat toute la campagne voisine.

Toutes les portes qui sont au nombre de neuf, ont un double pavillon, bâti de même sur le terre-plein de ces murailles, et garni d’artillerie, sans qu’il soit besoin d’autre fort ni d’autre citadelle car cette artillerie est plus que suffisante pour tenir le peuple en respect.

Les rues de cette grande ville sont droites, presque toutes tirées au cordeau, longues d’une bonne lieue, et larges d’environ six vingt pieds, bordées la plupart de maisons marchandes : c’est dommage qu’il y ait si peu de proportion entre les rues et les maisons, qui sont assez mal bâties sur le devant, et peu élevées.

On est étonné de voir la multitude innombrable de peuples qui remplissent ces rues, où il ne paraît aucune femme, et l’embarras que cause la quantité surprenante de chevaux, de mulets, d’ânes, de chameaux, de charrettes, de chariots, de chaises, sans compter divers pelotons de cent ou deux cents hommes, qui s’assemblent d’espace en espace, pour écouter les diseurs de bonne aventure, les joueurs de gobelets, les chanteurs, et d’autres qui lisent ou qui racontent quelques histoires propres à faire rire, et à inspirer de la joie, ou bien des espèces de charlatans qui distribuent leurs remèdes, et en exposent éloquemment les effets admirables. Les personnes qui ne sont pas du commun, seraient arrêtées à tout moment, si elles n’étaient précédées d’un cavalier qui écarte la foule, en avertissant de faire place.

C’est dans cette ville qu’arrivent continuellement toutes les richesses et les marchandises de l’empire. On se fait porter dans les rues en chaise, ou l’on y va à cheval, ce qui est beaucoup plus ordinaire. On trouve facilement et en beaucoup d’endroits des chevaux à louer, ou des chaises avec leurs porteurs. Douze ou quinze sols peuvent quelquefois suffire