Les soldats, qui auparavant étaient accoutumés au pillage, furent contenus dans la plus exacte discipline, et en peu de temps on vit régner l’ordre et la tranquillité dans les provinces. Tout retentissait des bénédictions dont les peuples comblaient un prince attentif à procurer leur bonheur.
Il fit graver sur tous les vases, qui étaient à l’usage du palais, les plus belles maximes de morale, afin que lui et ses officiers eussent continuellement devant les yeux, les principes selon lesquels ils devaient se conduire.
Il donna une marque bien éclatante de sa tendresse envers ses sujets dans le temps d’une sécheresse universelle qui dura sept ans, sans qu’il tombât une seule goutte de pluie, et qui est peut-être la même dont il est parlé dans la Genèse : attribuant à ses propres fautes une calamité si générale, il se dévoua comme une victime pour le salut de son peuple.
Après s’être imposé un jeûne rigoureux, il se dépouilla des ornements de sa dignité, il se fit couper les cheveux qu’on portait alors forts longs, et nus pieds, en posture de criminel, il leva les mains vers le ciel, et pria le Seigneur d’épargner ses sujets et de faire tomber sur lui seul tout le poids de sa colère. L’histoire rapporte qu’à la fin de la prière le ciel se couvrit de nuages, et qu’une pluie générale rendit les terres fécondes, et rétablit l’abondance.
La mort de ce prince, qui arriva la quarante-quatrième année du cycle, mit tout l’empire en deuil, et chacun le regretta, comme s’il eût perdu son père. Son fils aîné Tai ting étant mort avant lui, la couronne passa au petit-fils nommé Tai kia.
Les commencements du règne de ce prince firent tout craindre de son administration : loin de marcher sur les traces de son grand-père, il tint une conduite toute opposée, et capable de lui attirer le mépris et l’aversion de ses sujets.
Y yn, ce sage ministre, dont j’ai déjà parlé, en qui Tching tang avait mis toute sa confiance, s’était acquis une grande autorité dans l’empire ; il s’en servit pour remontrer au nouvel empereur l’abus qu’il faisait d’un pouvoir, que le Ciel ne lui avait confié que pour le bien des peuples, et lui rapportant les exemples de la colère céleste sur les princes vicieux, il s’efforça de lui inspirer l’amour des vertus propres d’un souverain.
Comme le jeune prince n’écoutait point les avis salutaires d’un si sage ministre, celui-ci s’avisa d’un expédient qu’on aurait peine à excuser de témérité, si sa probité et la droiture de ses intentions n’eussent été bien connues de tout l’empire.