Page:Du halde description de la chine volume 2.djvu/645

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d’hommes que n’en avait Tchin ? Non, sans doute. Et si je voulais punir vos fautes passées, comme elles le méritent, il me coûterait peu de le faire ; je n’aurais qu’à envoyer contre vous, comme contre lui, quelqu’un de mes officiers ; mais je n’aime point à nuire. Ainsi je prends le parti de la plus grande modération : je vous avertis, je vous instruit, et vous donne le temps de vous corriger. Répondez comme il faut à mes bontés, vous vivrez tranquille et heureux.


Tai tsong le second empereur de la dynastie Tang, que les historiens comparent aux plus fameux princes de l’antiquité, fit un écrit sur la différence du bon et du mauvais gouvernement, et sur la difficulté de bien régner. Comme il le faisait principalement pour son usage, il l’intitula le Miroir d’or, ou le précieux Miroir.


Après avoir donné chaque jour le temps nécessaire à expédier les affaires de mon empire, je me fais un plaisir de donner ce qu’il m’en reste, à promener ma vue et mes pensées sur les histoires du temps passé. J’y examine les mœurs de chaque dynastie, les exemples bons et mauvais de tous les princes, les révolutions, et leurs causes. Je le fais toujours avec fruit, et je l’ai tant fait que j’en puis parler. Toutes les fois que je lis ce qu’on dit de Fo hi, de Hoang ti, et de l’incomparable gouvernement de Yao et de Chun, je m’y arrête toujours. Je goûte, j’admire, je loue ; et je ne m’en lasse point. Quand je viens à la fin des Hia et des Yng, aux Tsin, et à certains règnes des Han, je me sens saisi d’une crainte inquiète. Il me semble marcher sur une planche pourrie, ou sur une eau profonde tant soit peu glacée. Quand j’examine d’où vient que tous les princes souhaitant de régner tranquilles, et de transmettre leur empire à une nombreuse postérité, il arrive cependant tant de troubles, et de si fréquentes révolutions, je trouve qu’il n’y en a point de cause plus ordinaire, que le peu de soin qu’ont les princes de réfléchir sur eux-mêmes, et l’éloignement qu’ils ont d’entendre ce qui peut les chagriner. Par là ils demeurent jusqu’à la fin aveugles sur leurs devoirs et sur leurs fautes ; et cet aveuglement les fait périr. Que cette vue m’inspire de crainte !

C’est pour éviter cet aveuglement, qu’après avoir vu par la lecture de l’histoire, quels sont les principes du bon gouvernement, et quelles sont