Page:Du halde description de la chine volume 2.djvu/653

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point en ces rencontres un prince également bon et sage ? Pour moi, roulant jour et nuit dans mon esprit toutes ces pensées, je sens le poids de la royauté ; mais encore plus sensible aux peines d’autrui, qu’aux miennes propres, je me dis souvent à moi-même : si le prince maître absolu a cependant tant à souffrir, que sera-ce de ceux qui sans être maîtres comme lui, partagent et portent avec lui le poids du gouvernement ? L’Y king dit : Les livres chinois n’épuisent point les matières : rarement aussi les paroles rendent-elles exactement les pensées dans toute leur étendue. Aussi n’ai-je prétendu dans ce discours qu’indiquer en peu de mots ce qui m’occupe intérieurement. Au reste, quoique, suivant un proverbe, celui qui souffre, se plaît à chanter ses peines, ce n’est point ce qui m’a fait prendre la plume. Je suis encore plus éloigné de chercher à frapper les yeux par une composition brillante. Je pense à m’instruire moi-même. Voilà mon but. Mais aussi je ne rougis point d’exposer dans cet écrit, à la vue de tous les sages mes pensées et mes sentiments.


Sur cette pièce l’empereur Cang hi dit : Rien de mieux pensé et de mieux exprimé, que ce que dit Tai tsong sur le gouvernement en général, et en particulier sur le choix des officiers. C’est rappeler comme il faut l’antiquité. Tai tsong fit plus : il l’imita. Son gouvernement approcha de celui de nos trois fameuses dynasties.


Le même empereur Tai tsong la troisième des années nommées Tchin koan fit l’ordonnance qui suit.


Le fondement de toutes les vertus, est celle qu’on nomme hiao[1]. c’est l’instruction la plus essentielle. J’en ai reçu dans ma jeunesse de bonnes leçons. Mon père, et ceux qu’il m’avait donnés pour maîtres, ne se bornaient pas à me faire réciter le Livre des vers, le Livre des rits, et d’autres ; on m’y faisait voir en même temps les grands principes dont dépend le bien des États, et le gouvernement des peuples. De là est venu l’avantage que j’ai eu d’exterminer par une seule expédition tous les ennemis de l’État, et d’assurer aux peuples qui sortaient de l’oppression, le repos et la liberté. Au reste j’ai toujours eu le cœur plein de bonté, et si pendant quelque temps j’ai fait paraître plus de justice et de sévérité que de clémence, c’est que comme il y a des ennemis, contre lesquels il faut nécessairement de la force et de la bravoure, il y a aussi des criminels auxquels on ne peut absolument faire grâce. Je n’ai eu en vue que le bien commun, et le repos de l’empire. La passion n’a point eu de part à ce que j’ai fait. L’empereur mon père en se retirant à Ta ngan, m’a chargé du gouvernement. Il a fallu lui obéir. Comme j’en sens tout le poids, je m’en occupe tout entier. Je suis dans l’intérieur de mon palais, et avec

  1. Piété filiale.