été dans les grands emplois, si lui Koan tchong n’avait toujours tenu ferme à les rejeter ? Ne devait-il pas prévoir ce qui arriverait après sa mort, s’il n’y mettait les plus grands obstacles ? Oui, je ne crains point de le dire, c’est Koan tchong qui perdit Tsi, si ce ne fut pas faute d’avoir imité Chun[1] et Confucius pendant sa vie, ce fut du moins pour avoir manqué de lui nommer un fidèle ministre à sa mort.
En effet, le plus grand malheur de Tsi ne fut pas précisément d’avoir ces trois méchants hommes. Ce fut de n’avoir plus un Koan tchong. Tandis qu’il vécut, ils n’eurent aucune autorité malgré leur faveur. Koan tchong dit au prince en mourant, qu’il ne devait jamais les mettre en place. Ce n’était pas l’essentiel. Car supposons que Hoen kong ayant égard à ce témoignage, les eût en effet laissés sans emploi, étaient-ils les seuls de leur caractère ? Hoen kong ne pouvait-il pas encore faire un mauvais choix ? Ce qu’il y avait d’important, c’était de profiter de l’occasion que lui fournissait le prince, de présenter quelque homme capable ; s’il avait laissé à l’État un autre lui-même, c’était l’essentiel ; et en ce cas-là il aurait pu sans conséquence se taire touchant ce qu’il dit sans aucun fruit sur le compte de ces trois hommes.
Des cinq Pa[2] fameux dans l’histoire, les deux plus puissants sans contredit, ont été Hoen kong prince de Tsi, et Ouen kong prince de Tsin. Ce dernier n’avait rien de supérieur au premier ; et les ministres qu’il avait choisis, ne valaient assurément pas Koan tchong. Tsi à la vérité eut le malheur après Hoen kong, d’avoir Ling kong, prince cruel ; mais Ouen kong eut aussi pour successeur Hiao Kong, prince excessivement doux, et dont l’extrême indulgence était du moins aussi dangereuse que la cruauté de Ling kong. Cependant, après la mort de Ouen kong, aucun des princes tributaires n’osa branler. Tsin les tint encore dans le respect et la soumission plus de cent ans. Tsi au contraire déchut d’abord après la mort de Hoen kong. Qui fit cette différence ? C’est que Tsin avait encore, après la mort de Hoen kong, de sages ministres qui, malgré les défauts du prince maintinrent les choses sur un bon pied : Tsi au contraire n’en avait point. Est-ce donc que quand Koan tchong mourut, il n’y avait pas dans tout l’État un homme capable de gouverner ? Qui le croira ? La faute fut donc de n’en pas produire. Se tsiou n’ayant pu pendant sa vie faire éloigner Mi tse toan, ni faire avancer Kiu pe you, trouve en mourant un moyen d’y réussir après sa mort. Siao ho prêt à mourir, présente Tsao tsou pour son successeur, quoi qu’il fût son ennemi. Voilà ce qui s’appelle des ministres intelligents et zélés. Ils savaient que le bonheur ou le malheur d’un État dépend d’un homme qui le gouverne. Ils auraient eu regret de mourir, si l’État en eût dû souffrir. Leur soin était en mourant de le pourvoir d’un bon ministre. Koan tchong mourut-il ainsi ?