Page:Du halde description de la chine volume 3.djvu/116

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« Depuis peu, par la divine bonté, je suis heureusement tombé entre les mains de deux saints docteurs venus du grand occident, Matthieu Ricci, et Didaque Pantoya. J’ai appris d’eux la doctrine de Jésus-Christ : j’ai vu entre leurs mains son image que j’ai révérée comme je devais : c’est par là que j’ai commencé à connaître mon Père céleste, et la loi qu’il a donnée aux hommes pour les sanctifier. Animé de ces grands motifs, que puis-je faire aujourd’hui que d’embrasser cette loi divine, et l’observer de tout mon cœur ?

Considérant néanmoins, que depuis quarante-trois ans que je suis au monde, je n’ai pu éviter de grandes chutes : je prie le souverain Père des hommes d’user de sa miséricorde envers moi, de vouloir bien me pardonner mes injustices, mes manquements de droiture, mes plaisirs sensuels et impurs, mes mauvaises volontés contre mon prochain, mes paroles indiscrètes et téméraires, et tout autre péché que j’ai pu commettre par inadvertance ou avec réflexion. Car je promets que dès maintenant, après que j’aurai été lavé de l’eau salutaire, que je vais recevoir avec un profond respect, je travaillerai à réformer ma vie, à éviter toute sorte de péchés, à observer la loi du Seigneur du Ciel, dont je crois fermement tous les points ; à observer les dix commandements qui y sont contenus, dont je souhaite de tout mon cœur ne m’écarter jamais un moment. Je renonce au siècle, à ses erreurs, et à ses mœurs corrompues. Je condamne tout ce qui est contraire aux maximes de la loi divine, irrévocablement et pour toujours.

« Je vous demande seulement une chose, Père et Créateur plein de bonté, que dans ces commencements de ma conversion, où n’étant encore que novice, j’ignore ce qui est de plus parfait, vous daigniez m’éclairer l’esprit pour me le faire connaître, et me donner la grâce de pratiquer ce que j’en aurai connu ; afin qu’ayant vécu libre des erreurs et des désordres de ma vie passée, j’aille bientôt jouir dans le ciel de votre divine présence. Je vous demande de plus la permission d’annoncer aux autres la foi, dont vous avez bien voulu m’éclairer, comme font par toute la terre un grand nombre de fervents chrétiens. Regardez, seigneur, avec miséricorde les vœux de votre serviteur, comme il vous les présente avec humilité, l’an trentième de Van lié, le sixième de la huitième lune. »

Le nombre des chrétiens augmentait chaque jour considérablement, et par le zèle des nouveaux fidèles, et par les continuels travaux du Père Ricci et de ses compagnons. Ceux-ci se répandirent dans les bourgades voisines de Peking, et formèrent des chrétientés nombreuses. Les villes des provinces imitèrent l’exemple de la capitale, comme le Père Ricci l’avait prévu. Il en recevait souvent des lettres, qui lui apprenaient le progrès qu’y faisait la prédication de l’Évangile. Celles qu’il reçut de Nan tchang, capitale du Kiang si, lui donnèrent la plus douce consolation. L’église n’était plus assez grande pour contenir le nombre des chrétiens : une famille entière de princes de la maison impériale qui y demeuraient, avait embrassé la foi ; et cet exemple fut suivi d’un grand nombre de lettrés.