vers les deux heures, qu'il s'éleva un vent variable ; il tomba quelques gouttes de pluie, mais qui ne dura pas. Le 13 nous fîmes 45 lys à l'est, prenant quelquefois tant soit peu du sud : le pays toujours semblable. Nous vînmes camper dans une petite plaine toute environnée de hauteurs, où nous trouvâmes un camp de Tartares de Kalka, qui étaient venus se réfugier là depuis quelques jours. C'était un prince de ce pays-là, frère de l'empereur même de Kalka, avec toute sa maison ; il y avait environ une trentaine de tentes assez pitoyables ; la sienne même n'était guère plus propre, mais seulement un peu plus grande : toutes les autres tentes étaient de ses gens, ou plutôt de ses esclaves ; il avait des troupeaux de moutons, de vaches, de chevaux, de chameaux en assez grande quantité. Quoique tout son train fût de la dernière gueuserie, il fut néanmoins assez fier pour ne pas venir visiter en personne Kiou kieou, se contentant d'y envoyer un de ses gens, et de lui faire dire, que comme il était fils d'un empereur, il ne pouvait lui céder le pas, et qu'il était obligé de garder son rang. Kiou kieou ne laissa pas de l'aller voir dans sa tente et d'y faire un repas, qui fut apparemment fort mauvais et fort malpropre. Car après les Cafres du Cap de Bonne-Espérance, je n'ai point vu de nation plus sale que ces Tartares. Ce prince avoua ingénument que l'irruption du roi d'Eluth sur les terres de Kalka l'avait obligé de s'enfuir avec tant de précipitation, et qu'il avait marché sept à huit jours de suite. Le soir je m'informai d'un de ces Tartares de Kalka, qui est au service d'un parent de Kiou kieou, comment ils vivaient dans un si mauvais pays. Il nous dit que durant tout l'été ils ne vivaient que du lait de leurs bestiaux, et de thé de la Chine : il ajouta qu'ils se nourrissaient de toute sorte de lait, aussi bien de cavales, et de chameaux, que de vaches et de brebis, que durant l'hiver, comme les bestiaux ne donnent pas de lait suffisamment, ils mangeaient de la chair à demi grillée sur du feu, qu'ils font des excréments séchés des mêmes bestiaux ; comme il fait extrêmement froid durant l'hiver, ils ne sortent point de leurs tentes, au milieu desquelles ils font toujours grand feu. Pour leurs bestiaux, ils les laissent paître à leur gré, et ils n'en prennent d'autre soin que celui d'aller tirer leur lait, ou d'en choisir quelques-uns pour les manger, quand ils en ont besoin. Ces Tartares ne sont pas apparemment fort vaillants : car les caravanes des marchands mores qui viennent à la Chine, passant dans leur pays, les pillent et les enlèvent impunément, pour les venir vendre eux et leurs bestiaux à Peking où ils font aussi trafic de cette sorte de marchandise. Ce Kalka même à qui je parlai avait été ainsi enlevé par les Mores, et vendu à Peking. Le temps fut assez doux l'après-dinée, mais il fit fort chaud le matin ; nous eûmes quelques gouttes de pluie sur les trois heures. Le 14 au matin le frère de l'empereur de Kalka envoya visiter Kiou kieou par un de ses parents, qui est aussi prince : il avait une veste de soie bordée
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