Page:Du halde description de la chine volume 4.djvu/399

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En arrivant au camp, nos gardes avancées amenèrent un Kalka, qui venait de l'armée des Eluths, pour se rendre au camp de l'empereur ; il dit, que n'étant point Eluth de nation, mais Kalka, qui avait été élevé dès sa jeunesse parmi les Eluths, et qu'ayant appris les bons traitements que l'empereur faisait à ceux de sa nation, et à tous ceux qui se mettaient à son service, il était venu trouver Sa Majesté. C'était un jeune homme d'environ vingt-cinq ans, qui paraissait avoir beaucoup de vivacité et d'esprit. Il assura que le roi d'Eluth se retirait en diligence vers la source de la rivière de Kerlon, à dessein de se mettre dans les bois et les montagnes qui sont de ce côté-là ; qu'il n'était qu'à deux cents lys de nous, et que les troupeaux de ses gens ne pouvant suivre l'armée, on avait d'abord proposé de les abandonner, mais qu'on s'était contenté de les laisser à la garde de quelques troupes, et qu'il avait pris les devants avec trois mille hommes ; que si nous marchions avec plus de diligence, nous les attraperions, et nous nous en rendrions les maîtres. Il ajouta qu'il avait entendu des coups de canon vers le lieu où s'était retiré le roi d'Eluth ; ce qui fit soupçonner que l'armée du général Fian gou pé en était venue aux mains avec les ennemis. L'empereur fit donner un habit de soie assez propre à la Mantcheou à ce Kalka, quoique quelques-uns soupçonnassent que c'était un espion envoyé du roi d'Eluth même, pour tâcher de nous surprendre. Le 10 nous fîmes encore soixante-dix lys au sud-ouest, toujours dans la plaine qui continue deçà et delà de la rivière de Kerlon, en la remontant ; la plaine va toujours en s'élargissant, et les collines qui sont au nord-ouest et au sud-est sont moins hautes. Presque partout il y a de fort bons pâturages et en abondance, mais on ne trouve ni arbre, ni buisson ; nous vîmes encore en chemin faisant, les vestiges d'un campement des Eluths, qui nous confirmèrent qu'ils se retiraient avec précipitation ; car ils avaient laissé beaucoup de choses dans leur camp, comme des bois de tentes, des chaudrons de fer, et plusieurs autres ustensiles de cette nature. Il vint encore deux gens de l'armée du roi d'Eluth, qui confirmèrent tout ce qu'avaient dit les premiers ; de sorte que l'empereur résolut de les poursuivre en toute diligence, en laissant quelques soldats des plus fatigués avec les chevaux, les bestiaux, et le gros bagage. Le temps était assez serein le matin, quoiqu'il eut un peu plu la nuit ; après le soleil levé il s'éleva un vent de nord-est médiocre, mais qui remplit l'air de nuages, et depuis midi jusqu'au soir il plut à diverses reprises ; il y eut quelques coups de tonnerre ; le matin le temps était froid, mais il fut fort tempéré depuis neuf heures jusqu'au soir ; le lieu où nous campâmes proche la rivière de Kerlon, s'appelle Kairé hojo. Le 11 nous fîmes quatre-vingt-dix lys, à l'ouest-sud-ouest, toujours en côtoyant la rivière de Kerlon, mais au-delà, environ à demie lieue de distance, marchant assez proche des collines qui sont au nord-est de la rivière ; le terrain n'était pas si bon que les jours précédents, il était bien plus sablonneux, aussi n'y avait-il que peu de fourrages. On voyait partout les vestiges des campements des ennemis, qui avaient presque consumé le peu de fourrage qu'il y avait. Ils avaient aussi jeté beaucoup de leurs ustensiles.