Page:Du halde description de la chine volume 4.djvu/46

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en chemin, ne manquent pas ordinairement de s'approcher jusqu'à une certaine distance sur les avenues. Ils s'arrêtent là, comme pour examiner si la biche est arrivée à l'endroit où ils voient les têtes de cerf, et donnent de la tête à droit et à gauche avec une espèce d'inquiétude. S'ils commencent même à labourer la terre avec leurs bois, c'est signe qu'ils s'approchent : en effet ils se jettent un moment après à travers les broussailles, dont les chasseurs sont presque couverts : mais ceux-ci leur épargnent une partie du chemin, en tirant sur eux leurs fusils dès qu'ils sont à portée. On sera peut-être surpris de l'intrépidité des chevaux tartares à la rencontre de bêtes aussi terribles, que le sont ces grands tigres. Ce n'est pas que les chevaux tartares craignent moins la première vue des bêtes fauves, que ceux des autres nations ; mais ils s'y accoutument plus aisément, parce qu'ils sont plus souvent dans l'occasion, et leurs maîtres prennent soin de les former à cette sorte de chasse. Les Mongous sont d'ailleurs habiles à exercer leurs chevaux : aussi en ont-ils une multitude de toute couleur, dont les noms pourraient faire une liste trois ou quatre fois plus grande que celle de nos écuyers. Ils savent les endurcir au froid et à la fatigue, de sorte qu'à Peking même, on les laisse tout le jour sans les faire paître jusqu'au soir. Ils ont une adresse particulière pour les prendre en courant, avec le nœud coulant d'une corde qu'ils leur jettent, pour les apprivoiser en très peu de temps, et pour les dresser à la Tartare. Ils connaissent leurs maladies, et se servent le plus souvent de remèdes, dont nos chevaux ne s'accommoderaient pas mieux que de leur manière de les nourrir. Cependant l'avantage est tout pour le cavalier, à qui il importe si fort d'avoir un cheval fort, robuste, capable de fatigues, et qui vive de peu. On ne doute pas que ces qualités ne paraissent à bien des Européens, ainsi qu'à nos Mongous, préférables à la beauté et à la grandeur. On ne peut pas même dire que les chevaux de ces Tartares soient petits : ils sont plutôt médiocres, et dans ce nombre presque infini, on en trouve toujours quelques-uns aussi gros et aussi beaux qu'on en ait en Europe. Tels sont ceux qui sont pour la personne de l'empereur, des princes, et des Grands de l'empire. Car on se pique fort à Peking d'être bien monté, et on n'y épargne pas l'argent. Un beau cheval, et même une mule, se vend assez ordinairement cinq à six cents livres, et souvent davantage. Les terres des Kalkas ne sont pas riches en peaux de zibelines, mais seulement en peaux de petit gris, de renard, et d'un animal aussi petit qu'une hermine, nommé tael pi dont on fait à Peking des teou pong, c'est-à-dire, des manteaux, pour se garantir du froid et de la neige. Cet animal est une espèce de rat de terre, fort commun dans certains quartiers des Kalkas. Les tael pi se tiennent sous la terre, où ils creusent une suite d'autant de petites tanières qu'il y a de mâles dans leur troupe : un d'eux est toujours au dehors, qui fait le guet, mais qui fuit dès qu'il aperçoit quelqu'un, et se précipite en terre aussitôt qu'on s'approche de lui. Ils