Le 14 nous fîmes 55 lys au sud-ouest, toujours dans la plaine, au milieu de laquelle coule la rivière de Kerlon ; après avoir fait environ quinze lys, nous passâmes la rivière, dans un lieu où elle n'avait pas plus de deux pieds d'eau, et environ soixante de largeur, qui est sa largeur ordinaire ; Tche tching han avec sa famille était campé là auprès des deux côtés de la rivière ; dans tout le voyage nous n'avions point vu d'endroit où il y eut tant de chevaux, de chameaux, et de troupeaux de chèvres ; il y avait aussi des moutons, des vaches, et des bœufs, mais en moindre quantité. Le han avait environ huit ou dix tentes qui paraissaient plus propres que les autres, mais elles n'approchaient pas de celles des seigneurs mantcheoux. On voyait outre cela deux tentes et pavillons, et un amas d'autres tentes ordinaires au-dessus et au-dessous de la rivière pour ses gens. Le han avait fait préparer un autre pavillon un peu éloigné pour y recevoir nos tagin et les y régaler à la manière tartare ; il les avait fait inviter par ses officiers, et quand ils furent à quelque distance du lieu où il résidait, il vint lui-même les recevoir à cheval ; il les mena à ce pavillon préparé, où ils descendirent. Le festin qu'on leur donna, consistait en huit ou dix moutons apprêtés de différentes manières, et servis dans des espèces d'auges de bois, (car il ne parut pas là d'autre vaisselle.) Quand ils eurent un peu goûté de ces viandes, et bu du thé préparé avec du lait, et du vin fait aussi avec du lait de cavale, ils remontèrent à cheval, et vinrent au lieu où nous campâmes, nommé Lahitoutala, sur les bords du Kerlon. L'eau en était fort trouble ; on y pêcha du poisson en quantité, surtout des carpes, mais elles n'étaient ni fort grosses, ni fort grasses ; la prairie était au sud de la rivière, mais un peu plus haut. Cette rivière serpente dans la prairie ; son cours n'est pas rapide, mais elle fait beaucoup de tours et de détours, et c'était pour éviter un grand tour qu'elle fait au sud, que nous la passâmes, et que nous marchâmes au-delà l'espace de quarante lys. Il y avait toujours dans la prairie de très bons pâturages. Les Kalkas de la dépendance du han, vinrent en notre camp avec quantité de chameaux et de chevaux pour faire leur commerce. La hauteur méridienne fut de 63 degrés qui donnent 48 degrés de hauteur du pôle. Le 15 nous fîmes 95 lys. D'abord nous allâmes près de vingt lys de l'ouest-sud-ouest, jusqu'à l'ouest un quart nord-ouest ; ensuite nous marchâmes dans de petites montagnes toutes chauves, environ vingt-cinq lys, à peu près à l'ouest un quart nord-ouest. Après avoir passé ces montagnes, nous entrâmes dans une grande plaine, qui s'étendait au nord à perte de vue ; on voyait quelques collines à l'ouest, et au sud-ouest ; les quinze ou vingt derniers lys nous vînmes presque droit à l'ouest, mais le reste nous avions marché à l'ouest-nord-ouest ; de sorte que tout compensé, on peut mettre à peu près quatre-vingt-dix lys au nord. Le pays que nous traversâmes était très ingrat ; le terrain de sable