Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome I, 1742.djvu/112

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séjour ou le quartier ordinaire des Cohortes Prétoriennes, ces Princes ne leur permirent pas long-tems de loger dans la Ville, où Auguste qui les avoit mises sur pied, les avoit éparses par chambrées de cent hommes chacune[1]. Elles avoient donc pour leur principale demeure un Camp entouré de murailles de briques, que Séjan leur avoit fait bâtir à une des extrêmités de Rome, dont il étoit en quelque sorte la Citadelle. Dans la suite elles en avoient eu encore un second auprès d’Albe.

Non-seulement il étoit rare qu’on séparât une Légion en plusieurs Corps qui servissent l’un dans un Païs, & l’autre dans un Païs different, mais il n’étoit pas ordinaire qu’on la fît passer de la Province où elle avoit coûtume de servir, dans une autre Province. Les Empereurs ignoroient que la raison d’Etat veut, pour me servir de l’expression usitée, qu’on promene les Troupes, et qu’on ne les laisse jamais trop long-tems dans les mêmes lieux ; ou bien ils craignoient de mécontenter les Légions s’ils la mettoient en pratique. En effet, rien ne contribua plus à faire révolter en faveur de Vespasien, et contre Vitellius les Légions qui avoient leurs quartiers en Syrie, que le bruit qu’on y sema, que le dernier pour récompenser les Légions des Gaules qui l’avoient salué Empereur, vouloit envoyer ces Légions sur l’Euphrate où le climat étoit plus beau et la guerre moins pénible, que sur les bords du Rhin, et que l’intention de ce Prince étoit de remplacer les Légions des Gaules par celles qui étoient actuellement en Syrie.

Ainsi les mêmes Légions servoient presque toûjours ensemble. Il y a plus, elles servoient presque toûjours avec les mêmes Cohortes auxiliaires, tant de Cavalerie que d’Infanterie. Ces dernieres troupes entretenuës & soudoyées par le Souverain, étoient composées de ceux des Sujets de l’Empire, qui ne pouvoient point entrer dans les Légions, parce qu’ils n’étoient pas Citoïens Romains. On ne vouloit recevoir dans ces Corps, le nerf de la Milice de l’Empire, que des hommes interessés par leur état personnel, à la conservation de la Monarchie. Le plan que Mecénas proposa à Cesar Auguste pour servir de régle dans le Gouvernement de l’Empire, & que Dion

  1. Dio. lib. hist. quinq. septimo.