Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome II, 1742.djvu/114

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légions se mettent en bataille, c’est sous des enseignes subordonnées les unes aux autres, & pareilles en cela aux enseignes qu’elles avoient avant leur capitulation avec les Francs & les Armoriques. Enfin elles observent en tout leur ancienne discipline. Elles sont toujours armées comme vêtuës à la Romaine, & même le simple Soldat y porte encore cette espece de chaussure particuliere au simple Soldat Romain, & connuë sous le nom de Caliga. Pour mettre mieux le Lecteur au fait de ma narration ; il faut le faire souvenir que tant que la Ville de Rome se maintint dans son ancien état, l’autorité de ses Empereurs fut toujours reconnuë dans une partie des Gaules, laquelle s’étendoit même jusques au Rhin ; mais après qu’Odoacer se fut rendu maître par force de cette Capitale de l’Occident, il ceda les droits de l’Empire sur les Gaules aux Visigots, qui s’étoient emparés de toutes celles des Provinces de cette vaste Contrée qu’ils avoient pû occuper, de maniere qu’ils avoient étendu leurs quartiers jusques aux Alpes, qui la séparent de la Ligurie. » Procope a raison d’ajouter cet éclaircissement à sa narration. En effet, comme nous l’avons vû, ce fut cette cession faite d’abord par Julius Nepos, puis confirmée un an après par Odoacer, et contre laquelle tous les Romains des Gaules se révolterent, qui donna lieu à la confusion où tomba leur patrie vers l’année quatre cens soixante et seize, et les progrès des Francs, dont notre historien rend compte, furent une suite de cette confusion.

Si Procope ne parle que de la cession faite par Odoacer, et s’il ne dit rien de celle que Julius Népos avoit faite un an auparavant, c’est parce qu’il écrit un abregé, ou peut-être pour rejetter entierement sur un roi barbare la faute qu’un empereur partageoit du moins avec lui. Les détails que cet historien rapporte concernant le service des troupes Romaines qui prêterent serment de fidelité à Clovis, semble marquer qu’il y avoit parmi elles et des troupes de campagne et des troupes de frontiere. Comme il a écrit soixante ans après l’évenement dont il s’agit, et comme il avoit pû voir, lorsqu’il étoit encore en Italie, des Francs et des Romains qui en avoient été témoins oculaires, les moindres circonstances dont il rend compte, sont dignes d’une grande attention, d’autant plus que c’est lui seul qui peut nous instruire aujourd’hui de ce point de l’histoire de l’établissement du royaume des Francs, dans laquelle il n’y en a pas de plus important. Ces évenemens arriverent, comme on le va voir, en