Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome II, 1742.djvu/133

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auroit corrigé sa faute, et il se seroit bien gardé d’y retomber dans celui de ses deux ouvrages, qui fut publié le dernier.

Il faut dire cependant, ou qu’il n’y a pas de faute dans Gregoire de Tours, ou qu’il y a fait deux fois et en differens tems une faute grossiere, en donnant la date de la mort du plus illustre de ses prédecesseurs. La faute seroit de telle nature, qu’elle ne pourroit être imputée qu’à lui ? Comment la rejetter sur les copistes ? C’est de la négligence qu’on leur reproche ordinairement, et non pas de la mauvaise foi. Or l’inattention peut bien faire mettre quelquefois un chiffre numéral pour un autre chiffre numéral, mais elle ne sçauroit faire écrire en deux endroits differens, le nom de deux consuls pour celui de deux autres consuls, ni marquer avec précision, le rapport de la date de l’évenement principal, avec la date des années du regne d’Arcadius et d’Honorius.

Plusieurs sçavans néanmoins se sont inscrits en faux contre cette date. Monsieur Gervaïse prévôt de l’église de saint Martin de Tours prétend que ce saint est mort, non pas en quatre cens quatre-vingt-dix-sept, mais dès l’année quatre cens quatre-vingt-seize. Il écrit dans sa vie de saint Martin[1]. » La premiere année du regne d’Arcadius & d’Honorius ayant commencé le seiziéme Janvier de l’année trois cens quatre-vingt-quinze, jour de la mort de Théodose le Grand, leur pere, la seconde a dû aussi commencer au seiziéme Janvier de l’année trois cens quatre-vingt-seize, & Saint Martin decedé en Novembre a dû être mort cette même année ? » Il n’est pas possible néanmoins de transporter à l’année trois cens quatre-vingt-seize le consulat d’Atticus et de Caesarius, qui suivant le rapport que toutes les tables des Fastes consulaires qui nous sont restées, ont avec l’ère chrétienne, ne furent consuls qu’en l’an de grace trois cens quatre-vingt-dix-sept.

Aussi n’est-il pas nécessaire de faire une pareille transposition, pour trouver que saint Martin est mort la seconde année du regne d’Arcadius et d’Honorius. Il suffit de supposer que Gregoire de Tours a compté les années du regne de ces princes par années révolues, et non point par années courantes. C’est ainsi qu’il calcule les années de l’épiscopat de saint Martin dans le passage qui vient d’être cité[2]. Alors on trouvera, comme nous l’avons déja dit, que saint Martin sera mort dans le mois de novembre de l’année trois cens quatre-vingt-dix-sept. Il sera mort quand ces princes, qui ne monterent sur le thrône que le

  1. Pag. 370.
  2. De Mir. lib. 1 cap. 3.