Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome II, 1742.djvu/143

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les, où étoit l’établissement de Sigismond. Nous rapporterons cette lettre de Sigismond quand nous en serons aux tems où elle fut écrite.

Theodoric en suivant ses nobles inclinations songea dès qu’il vit son pouvoir affermi, à faire des conquêtes à la fois avantageuses à sa réputation et profitables à l’Italie, où il vouloit être aimé. Il est vrai que celle de l’Afrique, dont les pirates saccageoient continuellement les côtes de l’Italie, et osoient même faire des descentes sur la plage Romaine, étoit la plus utile des conquêtes que Theodoric pût entreprendre. Mais les Ostrogots n’entendoient encore rien à la guerre navale, et les ports d’Italie devoient être dénués de vaisseaux depuis que les Vandales d’Afrique croisoient sans cesse dans la Mediterranée. Ainsi Theodoric tourna ses vûës du côté des Gaules. Si l’on excepte la conquête de l’Afrique, rien ne pouvoit donner plus de satisfaction aux Romains d’Italie où étoit, pour parler ainsi, le cœur du corps d’Etat qui composoit l’empire, que de voir une province de la Gaule réduite sous l’obeissance de leur prince, et l’autorité du Capitole rétablie au de-là des Alpes. En même tems rien n’étoit plus utile aux interêts de Theodoric qu’une telle acquisition, qui le mettroit en état de communiquer de plain pied avec les Visigots, peuple originairement de la même nation que ses Ostrogots et ariens comme eux. Il convenoit aux uns et aux autres de resserrer les anciens liens, en s’unissant aussi étroitement qu’ils l’eussent jamais été, et Theodoric en étoit si persuadé, qu’il donna dans ce tems-là sa fille Theodegote en mariage au roi des Visigots Alaric second.

Il auroit mieux valu pour Theodoric de s’agrandir seul et sans donner en même-tems à d’autres princes le moyen de s’agrandir aussi, mais il ne pouvoit point réussir dans son projet sans avoir les Francs pour alliés. Les Bourguignons unis étroitement à l’empereur d’Orient étoient en possession de la partie des Gaules qui confine avec l’Italie, et par laquelle Theodoric devoit commencer ses conquêtes ; leur nation étoit nombreuse et aguerrie. D’ailleurs elle étoit maîtresse des passages des Alpes les plus importans qui sont bien plus faciles à défendre contre les armées qui viennent d’Italie dans les Gaules, que contre celles qui descendent des Gaules en Italie. Ainsi Theodoric ne pouvoit pas réussir dans son projet à moins que d’avoir un allié qui fît une puissante diversion dans les Gaules. D’un autre côté il est apparent que la guerre entre Theodoric et Gondebaud durant la-