Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome II, 1742.djvu/149

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comme un transfuge. Roy débonnaire, lui dit ce fidéle déserteur, je quitte le Prince infortuné que je servois pour m’attacher à vous, & si vous daignez me recevoir au nombre de vos Sujets, vous & vos enfans vous trouverez toujours en moi un Serviteur parfaitement dévoué aux interêts de votre Maison. Clovis accueillit Aridius avec bonté & il retint auprès de lui ce Romain qui étoit aussi aimable dans la societé, que capable en affaires. Il prit son tems durant le siége d’Avignon pour dire à Clovis, Grand Prince, si vous daignez entendre un homme aussi peu important que moi, vous qui avez tant de Personnages éclairés dans votre Conseil, je vous donnerai avec sincerité un avis, que peut-être ne vous repentirez vous pas d’avoir écouté, & que tous les Pays exposés aujourd’hui aux malheurs de la guerre vous loueroient certainement d’avoir suivi ? Pourquoi ruiner vos Troupes en les faisant camper plus long-tems devant la Place imprenable où votre ennemi se tient enfermé ? Que peuvent faire ici vos Soldats, si ce n’est dévaster le plat Pays des environs ? Ils ne prendront point Avignon. Faites donc dire à Gondebaud que vous voulez bien faire cesser les hostilités, & même lui accorder la paix, à condition qu’il s’engage à vous payer un tribut annuel. Par-là vous le rendrez votre créature. Supposé que Gondebaud refuse d’accepter vos propositions, vous n’en serez pas moins après les avoir faites, le maître d’en user comme il vous plaira. Clovis prit le parti que lui suggeroit Aridius, & après avoir donné ordre à tous les détachemens qui faisoient le dégât dans le plat-pays de rentrer dans le camp, il fit proposer la paix à Gondebaud aux conditions qui viennent d’être exposées. Le Roy des Bourguignons les accepta, & promit d’acquitter ponctuellement la redevance annuelle à laquelle il s’obligeoit. Il en avança même la premiere année. » On ne sçauroit douter que Clovis n’ait compris son allié Godégisile dans le traité dont nous parlons, bien que Gregoire De Tours ne le dise pas. Je reprens sa narration.

« Aussi-tôt que Clovis se fût retiré, Gondebaud se tint dégagé du Traité qu’il venoit de signer avec ce Prince. Le Roi Bourguignon rassembla donc une armée, & marchant précipitamment, il vint assieger Vienne, où Godégisile se tenoit. Godégisile qui ne s’étoit point préparé à soutenir un siege, craignoit principalement que la Ville ne fût affamée, ce qui lui fit avoir recours à l’expedient de mettre dehors les bou-