Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome II, 1742.djvu/199

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a déja lû concernant l’altération des noms propres des lieux et des fleuves de la Gaule, que l’ignorance des copistes de Procope, leur a fait faire en transcrivant le texte de cet historien, nous nous contenterons d’observer que dans l’endroit même que nous restituons, ces copistes ont commis une faute bien plus considerable que celle que nous corrigeons. Ils y font dire à Procope qu’Amalaric roi des Visigots, étoit fils d’une fille d’Alaric Second, au lieu que Procope avoit certainement écrit conformément à la verité, et à ce que lui-même il dit ailleurs, qu’Amalaric étoit fils d’Alaric Second, et d’une fille de Theodoric roi des Ostrogots. Je reprends le fil de l’histoire.

Alaric dont le projet de ne point combattre, qu’il n’eût été joint par le renfort que Theodoric lui envoyoit, ne pouvoit pas se poster mieux qu’il l’avoit fait, en prenant un camp où il avoit la Vienne devant lui, et Poitiers dans ses derrieres. Il étoit difficile qu’il fût forcé dans un campement si bien assis, d’où il ne laissoit pas d’empêcher que les Francs s’avançassent dans son pays, puisqu’ils ne pouvoient pas y entrer sans s’exposer à perdre aussi-tôt toute la communication avec le leur. Ainsi l’embarras de Clovis qui se voyoit arrêté dès le commencement de sa carriere, ne devoit point être médiocre. Il perdoit un tems précieux pour lui, et dont les Visigots alloient profiter, soit pour se fortifier par les secours qui leur venoient, soit pour achever de découvrir le parti qu’il avoit dans leurs provinces, et pour le dissiper.

» Clovis, dit Gregoire de Tours (a), fur toute la nuit en prieres, demandant au Dieu des Armées qu’il daignât donner connoissance aux Francs d’un gué où ils pûssent passer la riviere qui les empêchoit de combattre leurs ennemis. Le lendemain l’armée des Francs vit distinctement une biche d’une grandeur extraordinaire entrer dans le lit de la Vienne, & la traverser sans perdre pied, comme si elle eût été envoyée du Ciel, pour enseigner l’endroit où cette riviére étoit guayable nonobstant la crue de ses eaux. L’armée des Francs passa donc la Vienne au gué que la biche lui avoit indiqué, & vint camper sur un terrain qui étoit en vûë de Poitiers. Ce fut