Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome II, 1742.djvu/247

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

dence livroit chaque jour entre les mains de Clovis les ennemis de ce Roi, dont elle se plaisoit à étendre la domination, parce qu’il avoit le cœur droit, & parce qu’il tenoit une conduite qu’elle approuvoit. » Saint Gregoire de Tours n’eût point parlé en ces termes des évenemens qu’on va lire, si le procedé de Clovis, n’eût point été justifié, ou du moins excusé par les menées de ses ennemis. Pourquoi cet historien, dira-t’on, n’a-t’il point rapporté les faits qui disculpoient en quelque sorte Clovis ? C’est que des considérations, qu’il est impossible de deviner aujourd’hui, l’auront engagé à passer ces faits sous silence. Puisque nous n’avons plus, pour s’expliquer ainsi, les pieces du procès, nous ne sçaurions faire mieux que de nous en rapporter au jugement qu’a prononcé le prélat vertueux qui les avoit vûës. Transcrivons presentement le récit qu’il fait de la catastrophe des ennemis de Clovis. Ce récit est la seule relation autentique de ce grand évenement que nous ayons aujourd’hui.

» Tandis que Clovis faisoit son séjour à Paris, il fit representer par ses Emissaires à Clodéric fils de Sigebert, que Sigebere étoit déja fort âgé, & d’ailleurs estropié de la blessure qu’il avoit reçûë à la journée de Tolbiac. Clovis faisoit assurer Clodéric en même tems, que son intention étoit de le favoriser en tour & de le maintenir sur le Trone des Ripuaires après la mort de Sigebert. Aussi-tôt que Clodéric se vit assuré d’un tel apui, il se laissa aveugler par l’ambition au point de commettre un parricide. Un jour que Sigebert, qui étoit sorti de Cologne, & qui avoit passé le Rhin pour prendre l’air dans les environs de la forêt Buchovia, dormoit après le dîner, des assassins subornés par le fils, ôterent la vie au pere. La Providence permit qu’à quelques jours de-là, Clodéric trébucha lui-même dans une fosse semblable à celle où ce malheureux fils avoit précipité son pere. Dès que Sigebert eut cessé de vivre, son fils donna part de cette mort à Clovis, & il lui manda : J’ai en ma possession les Etats & les trésors que mon pere a laissés : Envoyez-moi des personnes affidées à qui je puisse remettre ce que vous pourrez souhaiter des richesses qui sont à present à ma disposition. Clovis lui répondit : Je vous remercie de votre bonne volonté, & je vous prie seulement de faire voir à