Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome II, 1742.djvu/308

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Quoiqu’il y eut déja en cinq cens vingt-trois où nous sommes, près de quarante ans que Gondebaud avoit fait mourir Chilperic pere de sainte Clotilde, et fait jetter dans un puits la mere et les freres de cette princesse, elle conservoit encore néanmoins un vif ressentiment de toutes ces cruautés, dont elle n’avoit point pû jusques-là tirer vengeance. Mais lorsqu’elle vit l’évêque de Vienne mort, et Sigismond odieux également à ses sujets, et à Theodoric, elle crut que le tems de se montrer fidelle à ses devoirs et de tirer raison de ses injures par les voyes permises aux souverains, étoit enfin arrivé, et qu’il falloit, puisque Gondebaud n’étoit plus, s’en prendre à sa postérité.

Elle assembla donc ses trois fils, Clodomire, Childebert et Clotaire, à qui elle dit : que je n’aye pas sujet, mes chers enfans, de me repentir d’avoir toujours été la plus tendre des meres. Montrez donc que vous vous souvenez de la maniere inhumaine, dont mon pere et ma mere, qui m’avoient élevée comme je vous ai élevés, ont été traités. Allez les venger par les voyes les plus promptes et les plus sûres. Comme l’ambition conseilloit encore à ces princes l’entreprise à laquelle une mere respectable les excitoit, ils se mirent bientôt en campagne, dans la résolution d’accroître leurs partages des débris du royaume des Bourguignons, et de faire sentir à la posterité de Gondebaud, que le pere et la mere de Clotilde avoient des petits-fils dignes d’eux. Nos trois princes firent bien à Thierri leur frere de pere, la proposition de joindre ses armes aux leurs ; mais Thierri qui n’avoit point à venger Chilpéric, ni la reine femme de Chilpéric dont il ne descendoit pas, et qui d’ailleurs avoit épousé une fille de Sigismond, n’accepta point cette proposition, et il demeura neutre dans la guerre de ses freres contre son beau-pere.

Nous avons déja observé qu’on se gouvernoit alors dans les guerres par des maximes bien differentes de celles qu’on y suit aujourd’hui. Aujourd’hui tout l’honneur d’une campagne est