Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome II, 1742.djvu/31

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et les mots latins dont ces mots françois sont dérivés, observent que la prononciation des mots dérivés est plus douce que celle des mots dont ils dérivent. La formation des mots françois s’est faite presque toujours en supprimant une partie des consonnes qui sont dans les mots latins, comme en y changeant ou inserant des voyelles qui rendent moins âpre la prononciation des consonnes demeurées. C’est ainsi, par exemple, que de magister, on a fait maître. Cependant il faudroit que pour faire barbastre de barbaricus, on eût mis à la place d’un c seul, trois autres consonnes, entre lesquelles encore on n’auroit inseré aucune voyelle. Voilà ce que ne sçauroient croire des personnes entenduës en fait d’étimologie, et que j’ai consultées.

Les autres circonstances de la guerre de Clovis contre Syagrius qui se lisent dans Gregoire de Tours, portent encore à penser qu’elle fut seulement la suite d’un démêlé particulier entre le roi des Francs et l’officier Romain, et que ces deux seigneurs qui se connoissoient depuis long-tems, ne terminerent leur differend par la voye des armes, que parce qu’il n’y avoit point alors dans les Gaules une personne assez autorisée pour les empêcher d’en venir jusques-là. « Clovis, dit cet historien, ayant été joint par Ragnacaire, qui étoit aussi-bien que lui un des rois des Francs, il marcha contre Syagrius, et il envoya lui demander journée  ». Qu’on me pardonne cette expression, qui est celle dont se servent communément les auteurs du quatorziéme siecle, pour dire qu’un parti avoit défié l’autre, et qu’il lui avoit fait sçavoir par ses héraults, qu’un tel jour il se trouveroit en un tel lieu, pour y livrer bataille. Cette expression rend avec justesse celle dont se sert Gregoire de Tours, qui traduite à la lettre, signifie que Clovis envoya dire à Syagrius, qu’il eût à préparer un champ où ils pussent combattre l’un contre l’autre. » Ce Romain, ajoûte notre Historien, accepta le défi, & il se rendit promptement sur le lieu où Clovis devoit venir l’attaquer. La bataille se donna. Syagrius voyant ses troupes rompues, se sauva, & après avoir pris la poste, il ne s’arrêta plus qu’il ne fût arrivé à Toulouse, où Alaric Roi des Visigots faisoit