Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome II, 1742.djvu/327

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Munderic qui prétendoit être de la maison royale, et qui peut-être étoit le fils d’un des rois Francs que Clovis avoit sacrifié à sa sureté, fit un parti dans l’Etat. » Je ne suis pas de condition, dit ce Munderic, à vivre Sujet de Thierri, étant né ce que je suis ; je dois aussi-bien que lui porter une Couronne. Il faut donc que je me fasse reconnoître pour ce que je suis par une partie des Francs, dont je formerai une Tribu, laquelle me proclamera Roi, & qu’ainsi je donne à connoître à Thierri que je suis du Sang Royal aussi-bien que lui. Munderic se mit donc en devoir de séduire le Peuple, en disant : Je suis Prince de la Maison Royale, attachez-vous à moi, & je ferai votre fortune. » Plusieurs personnes le reconnurent et lui prêterent serment de fidelité. Il est sensible que le procédé et le discours de Munderic supposent qu’une des loix du droit public des Francs étoit ; que tous les princes issus des rois devoient avoir un partage, et qu’aucun d’eux ne dût être sujet d’un autre roi que de son pere, et ne devoit être réduit à un simple apanage. Ainsi quelque nombre d’enfans qu’un roi laissât, il falloit que chacun d’eux eût son royaume, ce qui ne pouvoit se faire qu’en divisant les Etats du pere, quelque petits qu’ils pussent être, en autant de partages qu’il laissoit de garçons. Voilà pourquoi il y avoit durant le regne de Clovis tant de rois Francs, quoique la nation fût peu nombreuse, et voilà l’origine de la divisibilité de notre monarchie sous la premiere et sous la seconde race. En effet, Munderic ne s’adresse point particulierement à certains Francs, à ceux qui auroient été sujets de son pere. Il s’adresse generalement à tous ceux qu’il peut séduire, et la raison qu’il employe pour les gagner, c’est qu’étant sorti de la maison royale, il a droit d’avoir un thrône et des sujets.

Je reviens à l’histoire de Munderic. Thierri informé de ses pratiques, lui manda de venir le trouver : si vous avez quelque droit, lui fit-il dire, nous sommes très-disposés à vous rendre justice sur vos prétentions. On se doute bien quelles étoient les intentions du fils de Clovis ; aussi Munderic ne jugea-t-il point à propos de se rendre auprès de Thierri et il répondit à ceux qui lui avoient parlé de la part de ce prince : faites souvenir votre maître que je suis roi aussi-bien que lui. Thierri résolut donc d’employer la force ouverte pour étouffer la révolte. Il envoya une armée contre Munderic, qui ne se trouvant point assez fort avec ceux qu’il avoit attroupés pour tenir la campa-