Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome II, 1742.djvu/362

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que-t’elle jamais de prétexte ? Vous les verrez alleguer pour justifier leurs armes jusqu’aux droits que les Camilles, les Marius & ceux des Césars qui ont fait des conquêtes au-delà du Rhin, leur ont acquis, à ce qu’ils s’imaginent, sur les Nations Germaniques. Enfin les Romains diront, qu’en se rendant maîtres des Pays que vous occupez, ils ne font que se remettre en possession de leur ancien patrimoine, & que du moins on ne sçauroit les accuser d’envahir le bien d’autrui : Quelle autre raison ont-ils alleguée du traitement qu’ils nous ont fait, quand ils nous ont chassés de nos maisons, quand ils ont égorgé la plus grande partie de notre Nation, & quand ils ont vendu à l’encan les femmes & les enfans de nos principaux Citoyens, si ce n’est celle-ci ? Que le Roi Theodoric, qui nous avoit établis en Italie, s’étoit emparé de ce Pays-là sans avoir un titre suffisant. Cependant Theodoric ne se rendit le maître de l’Italie, que de l’aveu de l’Empereur Zenon, qui regnoit pour lors sur les Romains d’Orient. » On a déja rapporté à l’occasion de cet évenement même, la suite de ces représentations des ambassadeurs Ostrogots auprès de Theodebald. Elles finissent par cette exhortation aux Francs. « Ne laissez donc point passer sans en profiter, la belle occasion que vous avez aujourd’hui de mettre obstacle à l’agrandissement des Romains en les empêchant de nous subjuguer. Il en est encore tems. Envoyez-nous des troupes à qui nous donnerons de bons guides, & bientôt elles auront chassé de notre Terre vos véritables ennemis. »

Retournons à la cession faite aux Francs par les Ostrogots, l’année cinq cens trente-sept. Comme on le verra, non-seulement elle contenoit le délaissement de toutes les cités que les Ostrogots tenoient encore dans les Gaules, ou dans la Germanie, mais aussi le transport et l’abandonnement total de tous les droits que les Ostrogots pouvoient, comme seigneurs de la ville de Rome, prétendre sur les autres pays de ces deux grandes provinces de l’empire d’Occident. Entrons en discussion de ces deux points-là.

Quant au premier point, le lecteur se souviendra bien de ce qui a été dit en parlant des suites de la bataille de Tolbiac : qu’une partie des Allemands lesquels y avoient été défaits, se soumit à Clovis ; que l’autre se retira dans les pays que les Ostrogots tenoient entre les Alpes et le Danube, et que là cette partie fut encore séparée en deux portions ; dont l’une resta en deça des