Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome II, 1742.djvu/390

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rique. Mais les hommes issus du sang François, sont toujours des François en Canada. Il en est de même des Sauvages, et c’est pour nous une nouvelle preuve : cela vient de ce que la distinction des nations cohabitantes dans une même contrée s’est conservée dans les pays dont il a été fait mention en dernier lieu. C’est de quoi nous parlerons bientôt un peu plus au long.

On ne doit donc pas être étonné que les Francs ayent habité long-tems dans la Gaule, sans prendre le nom de Gaulois et sans donner le leur à la Gaule. Quand même dans la suite ils ont donné leur nom à cette contrée, ce n’a été que peu à peu et successivement, comme nous le dirons dans la suite ; le nom de France ne fut donné d’abord qu’à une petite portion des Gaules, et il fut long-tems sans devenir le nom collectif de tous les pays de cette vaste contrée, soumis à la domination des rois Francs.

Ainsi le mot de peuple ne signifioit point dans les Gaules, durant les siecles dont je parle, la même chose que le mot de nation, et je supplie le lecteur de se souvenir de l’acception particuliere qu’avoient alors ces deux mots-là, qui dans le langage ordinaire, signifient aujourd’hui la même chose. Quoique les écrivains qui ont vécu sous nos premiers rois, n’ayent point été toujours assez exacts à n’employer le mot de Peuple, et le mot de Nation que dans l’acception propre à chaque mot, il est sensible néanmoins en lisant leurs ouvrages, qu’on entendoit alors par nation, une societé composée d’un certain nombre de citoyens, et qui avoit ses mœurs, ses usages, et même sa loi particuliere. On entendoit au contraire par le mot de peuple, l’assemblage de toutes les differentes nations qui habitoient sur le territoire d’une même monarchie. On comprenoit sous le nom de peuple, tous les sujets du prince qui la gouvernoit, de quelque nation qu’ils fussent citoyens. Ce que je dirai dans la suite, servira de preuve suffisante à ce que je viens d’avancer. Néanmoins je ne laisserai pas de citer ici un passage de la loi des Bourguignons qui le dit bien positivement. En pareilles questions, le texte d’une loi est ce qu’il y a de plus décisif. On lit dans le code des Bourguignons, publié par Gondebaud, dont les sujets ainsi que ceux de Clovis, étoient de differentes nations : » Si quelqu’un tue de guet-à-pens un homme libre de notre peuple, le meurtrier ne sera pas reçu à faire au-