Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome II, 1742.djvu/407

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âge que fussent ces enfans, ils ont toujours succedé à leur pere. Lorsque Clovis mourut, Clodomire l’aîné des trois garçons qu’il avoit eus de la reine Clotilde, n’avoit gueres que dix-sept ans, et l’on peut juger par-là, de l’ âge de Childebert, et de l’ âge de Clotaire, freres puînés de Clodomire. Cependant ces trois princes furent reconnus pour rois immediatement après leur pere. Ils s’assirent sur le trône dans un âge où les particuliers n’avoient point encore l’administration de leur patrimoine. Il ne paroît point en lisant ceux des écrits du cinquiéme siecle et des deux siecles suivans, que l’injure des tems a épargnés, qu’il y ait eu pour lors aucune loy qui déclarât les souverains majeurs, plûtôt que leurs sujets. La loi en vigueur aujourd’hui, et qui déclare nos rois majeurs à quatorze ans commencés, et par consequent beaucoup plûtôt que ne le sont leurs sujets, n’a été faite que sous la troisiéme race. Elle est le fruit d’une longue experience et de la prudence de notre roi Charles V[1]. Il est même certain que dans le tems où ce prince publia sa loy, nos rois n’étoient réputés majeurs qu’à vingt ans révolus, âge prescrit en plusieurs provinces pour être celui de la majorité des sujets.

On voit par le récit que Gregoire de Tours fait du meurtre des fils de Clodomire, et qui a été rapporté en son lieu, que le troisiéme de ces fils ne pouvoit avoir à la mort de son pere que cinq ou six ans. Cependant, quoiqu’ils n’administrassent point encore par eux mêmes les Etats de leur pere, ils étoient regardés comme successeurs de leur pere. Leurs oncles ne crurent pas qu’il leur fût possible de s’emparer des Etats de Clodomire, avant que de s’être défait de ses fils. Ce ne fut qu’après le meurtre de ces enfans, que Childebert et Clotaire partagerent entr’eux les Etats de Clodomire. Il paroît seulement en lisant dans Grégoire de Tours, la catastrophe des enfans de ce prince, qu’ils n’avoient point encore été proclamés, et même que ce fut sous prétexte de les inaugurer, que leurs oncles les demanderent à sainte Clotilde qui les avoit en sa garde. En effet, on voit par le contenu en l’édit[2] de notre roi Charles VI. où ce prince ordonne : que tous ses successeurs rois, en quelque petit âge qu’ils soient, soient appellés, leurs peres decédés, rois de France, et soient couronnés et sacrés ; que l’ancien usage de la monarchie n’étoit point que les successeurs, bien que recon-

  1. Edit de 1374.
  2. Donné en 1407.