Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome II, 1742.djvu/444

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mais eu lieu dans la Nation des Francs, qui est celle dont parle Monsieur de Valois. Il seroit inutile de prouver contre cet Ecrivain célébre, que les Sénieurs & les Mayeurs étoient Nobles, à prendre ce mot dans le sens d’illustre, de relevé, d’homme qui est au-dessus des hommes du commun. M. de Valois en tombe d’accord. Ce qu’il nie, & ce qu’on ne sçauroit lui montrer, c’est que les personnes Nobles fissent parmi la Nation des Francs, une Classe à part, & un Ordre séparé de l’Ordre du simple peuple, ainsi qu’elles en faisoient un parmi d’autres Nations Germaniques. En cela, l’usage des Francs étoit different de l’usage de ces Nations, comme le fait voir Monsieur de Valois. Parmi les Francs, tous les Citoyens nés libres, quoique de la lie du Peuple, pouvoient par la valeur & par une bonne conduite, parvenir au grade de Sénieur & de Mayeur. Que les Francs ne missent une grande difference entre ceux de leurs Concitoyens, qui étoient nés Libres, & ceux qui étant nés Esclaves, avoient eu besoin d’être Affranchis pour devenir Citoyens, on n’en sçauroit douter ; il paroît même en lisant Théganus, que les Citoyens nés libres, étoient qualifiés de Nobles dans l’usage du monde. Cet Auteur qui a écrit l’Histoire de Louis le Débonnaire, dont il étoit contemporain, y fait dire ses Acteurs qui entend parler du Roi : il vous a rendu libre, mais il ne sçauroit vous faire Noble, parce qu’on ne sçauroit jamais faire un Noble d’un homme qui a été Serf. Grégoire de Tours fait même une grande distinction dans le neuvième Chapitre de sa vie des Peres, entre les Citoyens, qui n’avoient point d’autre avantage que celui d’être nés libres, & les Citoyens illustres par leur Noblesse. »

Il est bon de rapporter les deux passages que cite Monsieur Hertius, et d’examiner en quoi ils peuvent être appliqués à notre question. Commençons par celui de Theganus. Cet auteur parlant de la déposition de Louis Le Débonnaire, mis en pénitence par le conciliabule tenu à Compiegne, en huit cens trente-trois, dit : » Les évêques prirent parti contre Louis,