Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome II, 1742.djvu/508

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ces sortes de procès faisoient le plus grand nombre des causes que les juges avoient à décider. Quant aux procès entre personnes de diverses nations, le demandeur devoit, en vertu du droit naturel, poursuivre ses prétentions suivant la loi à laquelle sa partie étoit soumise, et devant le tribunal dont elle étoit justiciable. Bientôt même, comme on a pû le remarquer, et comme je l’exposerai incessamment, il y eut des tribunaux mi-partis ou composés de juges de differentes nations, ce qui prévenoit tout conflit de jurisdiction, parce que ces tribunaux se trouvoient être des cours de justice compétentes pour juger tous les particuliers de quelque nation qu’ils fussent.

En troisiéme lieu, il y avoit dans chaque cité un officier, dont l’autorité s’étendoit également sur tous les tribunaux nationaux, et qui pouvoit en cas de conflit de jurisdiction, ou décider l’affaire par lui-même, ou la renvoyer devant le tribunal compétent. C’est ce qui paroît en lisant la formule des provisions des ducs, des comtes nommés par nos rois, pour gouverner dans un certain département ou simplement dans une cité. Il est dit dans cette formule dont nous avons déja fait mention plus d’une fois : » Vous nous garderez une fidélité inviolable, & vous maintiendrez en paix par votre bonne conduite, les Francs, les Romains, les Bourguignons & les Citoyens de toutes les autres Nations, qui composent le Peuple de votre district, & vous rendrez justice à chacun d’eux, suivant les Loix & la Coutume de la Nation, dont il se trouvera être Citoyen. »

Enfin le trône du roi étoit un tribunal toujours ouvert à ceux qui vouloient demander justice au prince lui-même, ce qui devoit bien abreger les procès les plus épineux. Nos rois exerçoient en personne toutes les fonctions de premiers magistrats de leur monarchie. On vient de voir, par exemple, que c’étoit au roi lui-même à donner force de loi aux testamens. Non-seulement, ces monarques jugeoient eux-mêmes les Francs, c’est ce que nous avons vû, mais ils jugeoient encore les Romains leurs sujets. Il y a plusieurs exemples de pareils jugemens dans cet ouvrage ; néanmoins j’en insererai deux ici. Il y avoit dans la cité de Tours une famille Romaine appellée Injuriosa  : il en sortit même durant le sixiéme siecle un évêque de ce diocèse ; et c’est à son occasion que l’Histoire ecclésiastique des Francs nous