Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome II, 1742.djvu/510

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point encore imaginé d’ériger en charges perpétuelles et lucratives, l’emploi de rendre la justice, et d’exclure de la fonction de la rendre tous les citoyens qui ne seroient pas revêtus de quelqu’une de ces charges, non plus que d’interdire aux juges toute autre profession que celle de juger. En un mot, on n’avoit pas fait encore de la dispensation des loix, un second encensoir en deffendant aux profanes, à ceux qui n’auroient point été initiés aux misteres de Themis, d’y mettre jamais la main. Enfin nos juges du sixiéme siecle n’avoient point d’interêt à faire durer les procès.

L’usage étoit encore parmi les Romains, lorsque notre monarchie fut établie, que l’officier du prince qui présidoit à un tribunal, choisît par lui-même, dans un certain ordre de citoyens, ses assesseurs ou ceux qui devoient juger avec lui. Les Barbares auront suivi, selon l’apparence, cet usage si simple et si naturel. Ainsi comme le comte avoit également inspection sur tous les tribunaux nationaux, comme il y présidoit, soit par lui-même, soit par son vicaire, il aura pû dans tous les tems introduire quelque juge Franc dans les tribunaux Romains, lorsqu’on y devoit juger la cause d’un Franc, et il aura pû de même introduire des juges Romains dans le Mallum, lorsqu’on y devoit juger la cause d’un Romain. Voilà ce qui se sera passé dans les tems qui ont suivi immédiatement celui de l’établissement des nations barbares dans les Gaules. On y aura donc pratiqué dans ces premiers tems à peu près ce qui se pratique encore aujourd’hui en Angleterre, dans le jugement d’un procès criminel fait à un étranger. On lui accorde que la moitié des jurés, ou de ceux de ses juges, qui doivent le déclarer innocent ou coupable du fait dont il est accusé, soit tirée de personnes de sa propre nation.

L’utilité de cet usage ayant été reconnue, elle aura donné lieu à l’établissement des tribunaux mi-partis, dont nous avons déja dit quelque chose, mais dont nous allons parler encore. Il paroît clairement, en lisant les passages qui ont été rapportés, et ceux qui vont l’être, que dans les tribunaux dont il s’agit, on rendoit la justice suivant des codes differens, afin qu’elle y pût être rendue à chaque sujet conformément à sa propre loi. Les chambres mi-parties ont toujours eu la réputation de rendre la justice encore plus légalement que les autres tribunaux. En quel tems nos rois ont-ils établi ces tribunaux, composés de