Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome II, 1742.djvu/512

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nimement, en rendant leurs Sentences, les maximes de la Justice. Il nous a paru que c’étoit-là le moyen le plus certain de faire vivre les Ostrogots & les Romains en bonne intelligence. »

On se doute bien que comme le comte Ostrogot prenoit des Ostrogots pour assesseurs, lorsque son tribunal devenoit une chambre mi-partie, de même le Romain que le comte avoit choisi pour second juge, se faisoit assister par des assesseurs Romains. Les successeurs de Theodoric observerent la maxime de gouvernement que ce prince avoit suivie. Voici ce qu’écrit Athalaric concernant le sujet dont il s’agit, dans une lettre adressée à Gildas, un Ostrogot qui exerçoit à Syracuse l’emploi de comte.

» On vous accuse de vouloir contraindre deux Romains qui sont en procès l’un contre l’autre à s’en tenir à votre décision. Si le fait est vrai, n’entreprenez plus rien de semblable, & ne vous rendez pas coupable par un désir inconsidéré de faire regner la Justice. Ne troublez point les Magistrats ordinaires dans les fonctions de leur ministere, & vous contentant de prêter main-forte à la Justice, laissez plaider les Romains devant les Tribúnaux Romains. »

Pourquoi nos rois n’auroient-ils pas eu à cœur de faire rendre une bonne et briéve justice à leurs sujets, autant que l’avoit le Theodoric dont nous parlons ? Pourquoi n’auroient-ils pas aussi-bien que lui, donné de tems en tems de ces exemples rigoureux qui retiennent les juges dans leur devoir bien plus efficacement que des édits, des déclarations et toutes les loix possibles ? Le continuateur de la Cronique d’Alexandrie[1] qui doit être né à la fin du sixiéme siecle, rapporte que Juvenilia, une dame Romaine, qui plaidoit depuis trois ans contre Formus, un patricien, présenta au roi des Ostrogots une requête par laquelle il étoit supplié de faire enfin juger son procès. Theodoric envoya chercher les juges, et dès qu’il leur eut enjoint de le terminer promptement, ils le jugerent en deux jours. Aussi-tôt que Theodoric fut instruit du fait, il fit couper la tête à ces juges iniques, pour avoir fait durer un procès qu’ils pouvoient finir en si peu de tems. Nos rois n’étoient pas plus familiarisés

  1. Cron. Alex. pag. 327.