Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome II, 1742.djvu/526

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Théodoric dans les provinces, ne devoient y prendre connoissance que des procès des Ostrogots, et tout au plus des procès des Romains qui plaidoient en qualité de demandeurs contre un Ostrogot.

Comme nous avons encore un édit celebre de Théodoric roi des Ostrogots fait pour être observé par tous ses sujets de quelque nation qu’ils fussent, et qui contient plus de cent articles, j’ai cru devoir entendre Procope, comme je l’ai entendu dans l’endroit, où il semble dire absolument que ce prince et ses successeurs n’avoient point fait de loix.

Je fais ici une réflexion. C’est qu’à me voir prouver si méthodiquement que nos premiers rois n’ont jamais exclu les Romains des Gaules, leurs sujets, des principales dignités de la monarchie, et qu’il est absolument faux que les Francs ayent ôté à ces Romains l’exercice des armes, il sembleroit que les auteurs modernes[1] qui ont avancé que ces princes avoient réduit nos Romains dans un état approchant de la servitude, fussent fondés en preuves. On croiroit que ces auteurs eussent rapporté quelque loi autentique par laquelle Clovis, ou l’un de ses successeurs auroit dégradé nos Romains, en les rendant, par rapport aux Francs, de la même condition qu’étoient les ilotes par rapport aux citoyens de Lacédemone, ou que le sont aujourd’hui les Grecs sujets du Grand-Seigneur par rapport aux Turcs, et que de mon côté je serois à la peine de prouver par les faits que cette loi seroit demeurée sans exécution. On croiroit du moins que j’aurois à réfuter des auteurs qui alleguent plusieurs exemples de Romains exclus des grandes dignités de la monarchie, parce qu’ils étoient Romains, ou tout au moins, que j’aurois à répondre à des écrivains tellement accrédités pour avoir composé sur les antiquités Françoises plusieurs ouvrages estimés du public, que leur sentiment formeroit seul un préjugé qui ne pourroit être détruit que par les raisons les plus solides.

Il n’y a rien de tout cela. En premier lieu, on n’a jamais vû aucune loi qui ait exclu les Romains des grands emplois de la monarchie, ni qui les ait réduits à un état approchant de la servitude. Jamais aucun auteur ancien n’a fait mention d’une pareille loi, et les écrivains qui ont la hardiesse de supposer qu’elle ait existé, le supposent gratuitement.

En second lieu, ces auteurs n’alleguent aucun fait dont on puisse induire l’existence de cette loi générale. Ils ne prouvent par aucun exemple qu’elle ait jamais été.

  1. Boul. Traité de la Noblesse, pag. 17.