Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome II, 1742.djvu/538

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ordres du roi, et s’adressoit directement au souverain.

Voilà pourquoi Fredegaire, parlant d’une armée nombreuse que le roi Dagobert I fit marcher contre les Gascons, dit, après avoir fait l’énumération des ducs qui l’avoient jointe avec les troupes de leur département : » Qu’il s’y trouvoit encore plusieurs Comtes, qui sous leurs propres auspices, y avoient amené les Milices de leurs Cités, parce qu’ils n’avoient point un Duc au-dessus d’eux. »

Quoique les rois conferassent les emplois de comte suivant leur bon plaisir, ils avoient néanmoins quelquefois la complaisance de laisser le choix de cet officier au peuple de la cité même, qu’il devoit gouverner. Gregoire de Tours rapporte comme un évenement assez ordinaire, que son diocèse se plaignant du gouvernement de Leudastés, le roi Chilperic premier donna commission à Ansoaldus de s’y rendre, pour mettre ordre au sujet de ces plaintes. Ansoaldus, ajoute l’historien, vint à Tours le jour de saint Martin, et il defera au peuple et à nous le choix d’un nouveau comte ou gouverneur. En conséquence de cette grace, Eunomius fut revêtu de l’emploi de comte : cela sent-il l’esclavage ?

Nous avons vû, en parlant de l’état des Gaules sous les empereurs, qu’il y avoit dans chaque cité un Senat, qui en étoit comme l’ame, et qui dans ce district, avoit la même autorité et le même crédit que le Senat de Rome avoit dans Rome sous le bas empire. Ainsi dans chaque cité, le Senat, comme nous l’avons dit, étoit du moins consulté par les officiers du prince, sur les matieres importantes, comme étoit l’imposition des subsides extraordinaires. C’étoit encore lui, qui sous la direction des officiers du prince, rendoit ou faisoit rendre la justice aux citoyens, et qui prêtoit la main à ceux qui faisoient le recouvrement des deniers publics.

Que ces Senats ayent subsisté sous les rois Mérovingiens, on n’en sçauroit douter. On vient de lire dans le neuviéme chapitre de ce livre, et on avoit lu déja dans d’autres endroits plusieurs passages de Gregoire de Tours, où il donne la qualité de sena-