Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome II, 1742.djvu/616

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

lieu que les Romains n’en portoient pas, il étoit défendu aux ecclésiastiques d’en porter. Cette prohibition a même continué long-tems dans quelques églises cathédrales, qui sont celles de toutes les compagnies où les anciens usages se changent le plus difficilement. Il étoit encore défendu durant le seiziéme siécle aux chanoines de l’église de Paris, de porter une longue barbe. Les ecclésiastiques, de quelque nation qu’ils fussent sortis, dûrent aussi conserver toujours l’habit long, ou la Toga, parce qu’il étoit l’habillement d’un citoyen Romain. Leur habillement aura même été emprunté ou imité par les principaux d’entre les Barbares, ou du moins par nos rois qu’on trouve vêtus de long dans les monumens antiques du tems de la premiere ou de la seconde race.

Je crois même aussi que les ecclésiastiques des Gaules ont conservé jusques sous les rois de la troisiéme race, la couleur de la Toga, qui étoit le blanc. Mon opinion est appuyée, sur ce que le blanc a été long-tems la couleur uniforme dans toutes les communautés religieuses fondées avant le douziéme siécle, et même de quelques ordres fondés dans les siécles suivans. Lorsque les Théatins furent institués vers le milieu du seiziéme siécle, il fut dit dans les premiers statuts de leur ordre : que la couleur uniforme des habits des religieux, seroit le blanc.

Quant aux ecclésiastiques séculiers, ils ont long tems conservé l’habit blanc. Monsieur Gervaise dit dans sa vie de l’apôtre des Gaules[1] : que jusqu’au tems où le pape Alexandre III vint à Tours, et qu’il y prit possession de l’église de S. Martin, ce qui arriva vers le milieu du douziéme siécle, les chanoines de cette église avoient porté l’habit blanc. Ce fut alors qu’ils quitterent le blanc pour prendre le rouge et le violet, qu’ils ont conservés pendant plusieurs siécles. Ce n’est que depuis le milieu du seiziéme siécle, que le noir est devenu, généralement parlant, la couleur uniforme des ecclésiastiques séculiers du second ordre, et celui de plusieurs societés religieuses. On a eu sans doute de bonnes raisons pour établir cet usage, mais je me figure que Sidonius Apollinaris et les autres évêques des Gaules qui ont vêcu dans le cinquiéme siécle, seroient bien surpris, si, qu’il me soit permis d’user ici de l’expression vulgaire, ils revenoient

  1. Pag. 321.