Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome II, 1742.djvu/93

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On n’a point de peine à le croire, dès qu’on fait reflexion à l’état où se trouvoit alors la religion catholique. La foi d’Anastase empereur des Romains d’Orient étoit déja plus que suspecte. Quant à l’empire d’Occident, il n’y avoit dans son territoire aucun roi puissant qui fût catholique le jour que Clovis se convertit. Theodoric roi des Ostrogots qui regnoit en Italie, et Alaric roi des Visigots qui tenoit presque toute l’Espagne et le tiers des Gaules, étoient ariens. Les rois des Bourguignons et le roi des Vandales d’Afrique étoient de la même communion. Enfin les rois des Francs établis dans les Gaules, professoient encore la religion payenne. Il n’y avoit donc dans le monde Romain, le lendemain de la conversion de Clovis, d’autre souverain que lui, qui fût orthodoxe, et de qui les catholiques dussent esperer une protection capable d’empêcher les princes ariens de les persécuter. Non-seulement les évêques de la partie des Gaules qui reconnoissoit le pouvoir de Clovis, mais aussi les évêques qui avoient leurs diocèses dans les provinces occupées par les Visigots ou par les Bourguignons ; en un mot, tous les évêques du partage d’Occident auront regardé ce prince comme un nouveau Machabée suscité par la Providence pour être leur consolation, et même pour être leur liberateur. Enfin, bien que le tems ait détruit la plus grande partie des monumens litteraires du cinquiéme siecle, il en reste encore assez pour montrer que Clovis devint après son baptême, le héros de tous les catholiques d’Occident.

Le premier de ces monumens, est la lettre que le pape Anastase II qui avoit été élevé sur la chaire de saint Pierre, peu de tems avant la conversion de Clovis, lui adressa pour l’en féliciter. Elle lui devoit être rendue par Eumenius, prêtre de l’église de Rome. Anastase dit dans cette lettre : » J’espere que vous remplirez nos esperances, que vous deviendrez la plus précieuse des pierreries de notre Tiare, & que vous serez la plus grande consolation de l’Eglise qui vient de vous enfanter à Jesus-Christ. Notre cher, notre glorieux Fils, continuez à donner des sujets de joye à votre Mere ; soyez pour elle un