Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome II, 1742.djvu/98

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d’Avitus concernant ce jeune homme, et de montrer que le Pere Sirmond a eu grande raison d’entendre par principale oraculum , un ordre de l’empereur Anastase, il est à propos de faire ici quelques autres observations sur la dépêche de cet évêque à Clovis. Ce ne sera point pour remarquer l’esprit dans lequel elle est écrite. Il y est trop sensible. Ce sera seulement pour en commenter l’endroit qui a rapport à un évenement dont nous n’avons point encore dû parler, et pour en expliquer un terme que quelques-uns de nos auteurs modernes ont, à ce qu’il me paroît, mal interprété.

Je dirai donc en premier lieu, que tout ce qui se trouve vers la fin de cette dépêche concernant les heureux évenemens qui arrivoient aux habitans des provinces des Gaules déja soumises à Clovis, et dans lesquels Avitus prend tant de part, regarde la réduction des Armoriques à l’obéissance de ce prince, suivie immédiatement de la capitulation que firent avec lui les troupes Romaines qui étoient encore dans les Gaules. Nous rapporterons dans le chapitre suivant ces deux évenemens arrivés peu de mois, et peut-être peu de jours après le baptême du roi des Saliens, mais qu’il fut aisé de prévoir, dès que ce prince eût déclaré qu’il alloit se faire catholique. En second lieu, j’observerai que l’épithete de votre soldat de miles vester , qu’Avitus donne au roi Gondebaud, ne doit pas être prise absolument dans son sens litteral, et qu’elle ne signifie pas nécessairement que le roi des Bourguignons fût le soldat de Clovis, ou pour parler le langage des siecles suivans, son feudataire : Gondebaud étoit un roi bien plus puissant sans comparaison que Clovis, lorsque ce dernier parvint à la couronne en quatre cens quatre-vingt-un, et nous ne voyons point que Clovis ait fait la guerre à Gondebaud, ni qu’il ait acquis aucun avantage sur lui, avant l’année cinq cens, qu’il l’attaqua et qu’il l’obligea de se rendre son tributaire. Suivant l’apparence cette expression de votre soldat a rapport à ce qui se traitoit dès-lors à Constantinople par Laurentius[1]. On peut bien croire que lorsque Anastase conféra la dignité de consul à Clovis, ce ne fut point en conséquence d’une négociation momentanée. L’empereur d’Orient n’aura point pris un parti aussi délicat que celui-là, sans avoir traité long-tems sur une pareille affaire, et sans avoir voulu être informé du sentiment des serviteurs qu’il avoit dans les Gaules. Ainsi quoiqu’Anastase n’ait conféré la dignité de consul à Clovis que dix ou douze années après sa conversion, il se peut

  1. C'est-à-dire en 496.