Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome II, 1742.djvu/99

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

bien faire que long-tems auparavant, cette affaire importante fût déja sur le tapis, et peut-être, que l’empereur eût laissé entendre qu’il revêtiroit le roi des Saliens de cette dignité aussi-tôt qu’il se seroit fait baptiser. Avitus qui étoit de l’intrigue, et que la situation où il se trouvoit, obligeoit à ne s’expliquer qu’en termes ambigus, aura donc fait allusion à l’état present de la négociation, lorsqu’il aura écrit à Clovis : « Gondebaud est à vos ordres, il est déja votre soldat. » C’étoit lui dire, puisque vous voilà chrétien, vous allez recevoir bientôt de Constantinople le diplome du consulat, et vous pouvez déja regarder Gondebaud comme un officier qui vous sera bientôt subordonné. En effet Gondebaud n’étoit que Patrice, et nous avons vû que suivant la constitution de l’empire dont les rois barbares établis sur son territoire, affectoient de paroître respecter les reglemens, le patriciat étoit une dignité subordonnée au consulat.

Qu’Avitus se soit servi des termes de Miles vester , pour exprimer la subordination de Gondebaud à Clovis, laquelle Avitus croyoit déja voir, il n’en faut point être surpris. Dès qu’on est médiocrement versé dans la connoissance des usages du quatriéme siecle et des deux siecles suivans, on n’ignore plus que les Romains de ces tems-là donnoient abusivement le nom de Miles , ou de Soldat , à tous ceux qui étoient au service des empereurs, en quelque qualité que ce fût, même à ceux qui exerçoient les emplois les plus éloignés de la profession des armes. En un mot, on comprenoit alors sous le nom de soldat, ceux mêmes des officiers du souverain qui sont désignés par le nom de Gens de plume , dans quelques-uns de nos auteurs François. Le lecteur peut consulter sur ce point-là, le Glossaire de la moyenne et de la basse latinité, de M Ducange. Cet usage étoit même cause qu’il y avoit dès le quatriéme siecle deux milices distinctes, l’une désignée par le titre de Milice armée , et l’autre par celui de Milice du Palais . Sevére Sulpice dit dans la Vie de saint Martin, que ce saint avoit servi étant encore fort jeune dans la milice armée . Cette distinction des deux milices, étoit comme une suite nécessaire de la nouvelle forme de gouvernement que Constantin Le Grand avoit établie, et dont nous avons parlé suf-