Page:Ducharme - Journal d’un exilé politique aux terres australes.djvu/64

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
66

lieu pendant le jour, nous rappellent le climat du Canada. Vers neuf heures du soir, la tempête qui avait menacé tout le jour, éclata de la manière la plus furieuse. Les vagues s’élevaient à une hauteur effrayante ; le vaisseau montait comme sur de vastes montagnes et ensuite retombait de tout son poids dans un gouffre profond. La mer tombait par masses sur le vaisseau : le vent soufflait avec furie, la grêle, la pluie, les éclairs, l’on aurait dit que tous les éléments s’étaient ligués pour nous perdre ; notre vaisseau fut aussi maltraité que s’il avait été exposé au feu d’un combat : les voiles se déchirèrent, les antennes se brisèrent, les planches qui servaient à entourer le vaisseau furent rompues et emportées. Des barriques qui étaient attachés sur le pont se délièrent ; elles furent jetées à la mer par les matelots pour prévenir les accidents. Le vaisseau craquait et s’ébranlait, par la secousse de la mer : deux hommes étaient attachés à la roue du gouvernail. Tout ceci se faisait pendant la plus obscure des nuits.

le 11, le mauvais temps continua avec la même impétuosité. Le pont présentait le plus affreux spectacle. Tout y était brisé et dévasté : l’eau le couvrait à la hauteur des genoux, il nous était impossible d’y demeurer. Jamais les matelots n’avaient vu une tempête si affreuse et de si longue durée. Pendant ces deux derniers jours nous naviguâmes entre deux eaux ainsi que la nuit.

les 12, 13 et 14, vent un peu modéré quoiqu’encore très violent soufflant toujours de l’ouest ;