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Page:Ducros - Les Encyclopédistes.djvu/250

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jesté de mettre un frein « à cette philosophie impérieuse et superbe, qui ne s’abaissait plus à couvrir ses paradoxes d’un voile séducteur, mais qui osait dogmatiser avec la plus entière indépendance[1] ». Puis l’archevêque de Toulouse lut en séance, le 6 août, un solennel avertissement aux fidèles du royaume sur les dangers de l’incrédulité. Des exemplaires de cet avertissement furent présentés par l’abbé Dulau au roi, à la famille royale et aux principaux personnages de la cour à Compiègne. Le duc de la Vrillière, ce grand pourchasseur de huguenots[2], assura à l’abbé Dulau qu’il s’occupait plus sérieusement que jamais « d’arrêter le débordement des productions impies » et l’abbé put même, en rendant compte de son mandat à l’Assemblée, apporter à celle-ci la bonne nouvelle qu’un ballot de mauvais livres venait d’être tout récemment saisi, et que la peine d’une humiliante détention avait été décernée contre les délinquants.

Mais les délinquants, à cette date, c’était tout le monde, et non seulement tout Paris, mais bientôt, à moins qu’on ne se décidât à sévir avec la dernière rigueur, la France entière : c’est ce que l’Assemblée savait mieux que personne, renseignée qu’elle était par les évêques venus de tous les points du royaume, et c’est ce qu’elle se chargea de dire au roi dans un dernier Mémoire, qui est comme un avertissement suprême et presque irrespectueux : il formulait d’amers reproches à l’adresse d’un gouvernement si peu soucieux de se défendre ou plutôt, tant le danger était pressant, de se sauver lui-même en face de « ce torrent qui avait pénétré dans l’intérieur des provinces ; il n’y avait plus de ville ni de bourg qui fût exempt de la contagion de l’impiété. Or, avec la foi, allaient s’éteindre à jamais les sentiments d’amour et de fidélité à la personne

  1. Procès-verbal de l’Assemblée générale du clergé de France tenue à Paris, au couvent des Grands-Augustins, en l’année 1770. Manuscrit, Archives nationales.
  2. Il était l’intermédiaire officiel entre le gouvernement et les Assemblées ecclésiastiques.