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Page:Ducros - Les Encyclopédistes.djvu/85

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l’Encyclopédie ont été réunis par lui, un peu modifiés, dans ses Éléments de littérature.

Pendant que le combat s’engageait contre l’Église dès les premiers volumes de l’Encyclopédie, où donc était celui qu’on a l’habitude de voir au dix-huitième siècle à la tête des combattants et qui s’appellera à bon droit lui-même à la fin du siècle, « le patriarche des écraseurs », où était et que faisait Voltaire ? Il était, depuis 1750, loin du champ de bataille, à Berlin, où il achevait le Siècle de Louis XIV, lequel allait achever sa renommée. À cette époque, s’il n’est pas encore, il s’en faut, le roi de l’opinion, le roi Voltaire, il n’en est pas moins l’homme de lettres le plus en vue : au moment où il commencera à travailler pour l’Encyclopédie, en 1755, Montesquieu est mort ; Buffon n’a donné que quatre ou cinq volumes de son Histoire naturelle ; ses Quadrupèdes vont de 1749 à 1768 et ce n’est qu’en 1778 qu’il écrira son chef-d’œuvre, les Époques de la Nature ; il est le premier, sans doute, mais dans sa spécialité, tandis que Voltaire s’est déjà illustré dans presque tous les genres. Il a doté la France de La Henriade (1723), laquelle, aux yeux de tous les contemporains, l’a sacré grand poète ; au théâtre, il a déjà donné Zaïre (1732), « la pièce enchanteresse », et Mérope (1743), son chef-d’œuvre ; comme prosateur, il a lancé depuis longtemps son premier brûlot, les Lettres anglaises (1734) ; puis, il a écrit, en vrai savant, les Éléments de la philosophie de Newton (1738), et maintenant son Siècle de Louis XIV (1752) s’ajoutant à son Charles XII, vient ajouter aussi à ses titres de poète et de philosophe la gloire d’être le premier historien de son temps. Hier encore on le discutait, on le traitait même « d’homme médiocre en tout », au grand étonnement de Grimm, fraîchement débarqué à Paris (1749) ; mais l’époque de son départ pour Berlin, (en 1750), fut, d’après ce même Grimm, « l’époque de la justice que lui rendit son pays » ; et depuis, sa renommée n’a fait que grandir : car d’Alembert, qui ne loue jamais qu’à bon escient, lui accorde, dès 1751, dans son Discours préliminaire, une place d’honneur, « une place qui n’est qu’à lui