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Page:Dufour - Étude sur l’esthétique de Jules Laforgue, 1904.djvu/29

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gine transcendante : l’intervention d’une puissance surhumaine, sur leur conception de laquelle ils modèlent un idéal, d’après quoi ils approuvent, blâment, classent les écoles et les œuvres. Laforgue, pourtant, n’adhère point à leurs doctrines, parce que les idéaux qu’ils proposèrent furent « des lits de Procuste à l’histoire de l’art humain ». Les déterministes se bornent, comme les savants, à constater, « montrent bien le comment humain des génies et des œuvres », mais se taisent de propos délibéré sur le pourquoi ; ils s’interdisent d’en définir l’essence ; ils les acceptent, avec indifférence, comme des phénomènes également légitimes et considérables, bien que la « simple loi de la sélection naturelle universelle, qui signifie choix en soi et tendance divine unique, proclame qu’un idéal vivifie, ordonne et domine tout. » Bref, les idéalistes sont trop prompts à rendre des arrêts et enclins à tenir notre goût « en lisières ; les déterministes, limitant leur étude à observer et décrire, nous abandonnent à nous-mêmes, quand s’impose la nécessité de conclure.

Si Laforgue déclare son penchant vers ces derniers, il n’en sent pas moins le besoin de s’élever au-dessus d’un positivisme étroit. Il faut, dit-il, « un brin de foi nouvelle ». Ainsi, tout en restant un déterministe, l’on serait guidé dans des recherches, au demeurant exactes et impartiales, par « une idée esthétique directrice ».

Gustave Kahn, racontant ses premiers entretiens avec Jules Laforgue, durant l’été de 1880, dit qu’ils convinrent que deux réformes étaient opportunes : substituer le vers libre aux rythmes fixes des romantiques et des