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Page:Dufour - Étude sur l’esthétique de Jules Laforgue, 1904.djvu/46

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ont éliminé de leur palette les noirs et le bitume, dont se servait encore Manet. Le noir n’est point dans la nature. Les premiers, Monet, Sisley, Cézanne ; à leur école, Pissarro ; après eux, les « néo-impressionnistes » ont, dans leurs paysages, exprimé la féerie et la joie de la lumière, en composant leurs ombres par les bleus et les violets, et non point par des tons neutres sans limpidité ni résonance. Même technique pour les peintres d’« intérieurs « comme Degas et Vuillard. Ni dans les « coulisses » de celui-là, ni dans les « salons » de celui-ci, les tons bitumineux n’amortissent les effets. — Cette réforme n’était pas moins opportune, elle ne suscita pas moins d’imitations hors de l’école ( « On nous fusille, cinglait Degas, mais on fouille nos poches » ) que la division du ton. Nouvelle preuve que ce sont bien les impressionnistes, et non les « académiques » dont l’œil est « naturel ».

J’ai résumé en ses traits les plus caractéristiques l’esthétique de Jules Laforgue, m’appliquant à ordonner ses Notes sans lien apparent, à concilier celles qui, à première vue, semblent contradictoires. Pour gloser la lettre, quand elle était obscure ou trop concise, je ne crois pas en avoir faussé l’esprit. J’ai, d’ailleurs, cité les pages les plus significatives : pierres de touche qui permettront d’éprouver mon commentaire.

L’on ne contestera point sur l’originalité de cette esthétique. Disciple de Taine, qu’il réfute, mais dont il