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Les gouvernements de France et d’Angleterre organisent l’économie en système, contrôlent la dépense ; déjà les Anglais goûtent du pain noir, et les Français font maigre deux jours par semaine. Bref, ce n’est plus l’abondance, c’est presque la disette ; la famine parle de suivre. Pour les Canadiens, il n’y a pas d’économie qui tienne, si l’exportation doit ainsi drainer nos vivres ; il nous faut produire, produire le plus possible, du bétail, des œufs, du beurre, des chevaux, des légumes.

ce qu’on a fait

Tandis que dans les vieux pays on cultive jusqu’au dernier pouce de terrain, le Canada n’exploite pas 8 % de sa superficie totale. Dans notre Québec, rien que 3 1/2 % des terres sont en culture, soit 15,613,000 acres sur 442,153,000 ; et 44,215,000 d’acres, c’est-à-dire 442,000 terres, déjà arpentées ou explorées, n’attendent que des défricheurs pour muer leur forêt en moissons et en paroisses. Les bras manquaient-ils donc, avant la guerre ?

Une forte propagande d’immigration a fourni des centaines de mille semeurs à l’Ouest et des centaines de paveurs à Montréal. L’Ouest se peuplait vite, grâce au merveilleux plan de colonisation des gouvernements et des compagnies de chemins de fer ; notre province a vu diminuer sa classe rurale par suite d’un système de colonisation pointilleux et barbare, qui n’attirait aucun Européen et décourageait notre propre jeunesse, ces 40,000 immigrants qui nous tombent du ciel chaque année, par le seul excédent de nos naissances.

La superficie des terres occupées n’est pas ici ce qu’elle devrait être, non plus que notre population, du reste. Les deux faillites ont marché de concert ; nos gens ont émigré lamentablement parce qu’ils n’avaient pas de terres