Page:Duhem - ΣΩΖΕΙΝ ΤΑ ΦΑΙΝΟΜΕΝΑ.djvu/75

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admettons que les choses se passent de la sorte jusqu'à ce que, nos yeux nous servant de guides, nous ayons appris à l’aide d’un tableau ce que nous voulons connaître des mouvements stellaires, et que nous les ayons saisis en leurs valeurs numériques et en leurs dimensions.. Mais dès là que notre esprit aura été pleinement et exactement imbu de ces nombres et de ces grandeurs, que la connaissance en aura pénétré notre intelligence, regardons les cercles que dessinent les astronomes comme ayant bien moins de réalité dans le Ciel que les lignes tracées par les aruspices n’en ont dans l’air. »

« Ces orbes sont imaginaires, dit encore Pontano[1], car, en son entier, la masse des cieux est continue ; tenons-les, cependant, pour une invention presque divine tant qu’il s’agit d’enseigner, d’exposer aux yeux, de représenter le mouvement des étoiles ; grâce à cette invention, l’intelligence possède une représentation sensible qui sert de fondement au début de ses recherches ; mais, à partir de là, elle progresse peu à peu, et elle finit par rejeter toutes ces combinaisons d’orbes imaginaires, pour ne plus s’attacher qu’aux nombres et aux rapports de nombres, qui sont son objet propre. »

La pensée de Pontano est claire : La détermination numériquement exacte des mouvements célestes est le véritable but de l’Astronomie ; les excentriques, les épicycles et autres hypothèses de l’Astronomie ne sont que des artifices d’enseignement, des représentations provisoires qui doivent disparaître lorsque les éphémérides et les tables astronomiques sont construites ; inspiré, à n’en pas douter par les idées de Proclus, notre astrologue de la Renaissance ne veut reconnaître aux théories astronomiques que deux rôles légitimes : le rôle de recettes géométriques propres à la construction de tables qui permettent de prévoir les mouvements célestes ; le rôle de modèles mécaniques mettant les sens au service de l’intelligence dans l’étude de l’Astronomie. Les idées qu’il émettait au voisinage de

  1. Pontano, loc. cit., éd. cit. p. 278.