Il ne saurait, non plus, nous avertir plus clairement que les modèles qu’il nous propose ne doivent pas être pris pour des explications des lois naturelles ; celui qui leur attribuerait une telle signification s’exposerait à d’étranges surprises.
Navier et Poisson ont formulé une théorie de l’élasticité des corps cristallisés ; 18 coefficients, en général distincts les uns des autres, caractérisent chacun de ces corps[1]. W. Thomson a cherché à illustrer cette théorie au moyen d’un modèle mécanique. « Nous n’avons pu, dit-il[2], nous déclarer satisfaits que nous ne soyons parvenus à créer un modèle avec 18 modules indépendants. » Huit boules rigides, placées aux huit sommets d’un parallélipipède, et reliées les unes aux autres par un nombre suffisant de ressorts à boudin, composent le modèle proposé. À son aspect, grand serait le désappointement de celui qui aurait attendu une explication des lois de l’élasticité ; comment, en effet, s’expliquerait l’élasticité des ressorts à boudin ? Aussi, le grand physicien anglais n’a-t-il point donné ce modèle pour une explication. « Bien que la constitution moléculaire des solides qui a été supposée dans ces remarques, et qui a été illustrée mécaniquement dans notre modèle, ne doive pas être regardée comme vraie en nature, néanmoins la construction d’un modèle mécanique de ce genre est certainement très instructive. »
- ↑ Du moins selon W. Thomson. En réalité, Navier n’a jamais traité que des corps isotropes. Selon la théorie de Poisson, l’élasticité d’un corps cristallisé dépend seulement de 15 coefficients ; les principes de la théorie de Navier, appliqués aux corps cristallisés, conduisent à un résultat semblable.
- ↑ W. Thomson : Lectures on molecular Dynamics, p. 131.