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l’objet de la théorie physique

en équations et une vérification expérimentale au sujet desquelles personne n’aurait le moindre doute. Mais tel n’est point le cas des équations de l’électro dynamique étudiées par Hertz ; les raisonnements et les calculs par lesquels Maxwell s’est efforcé, à plusieurs reprises, de les justifier abondent en contradictions, en obscurités, en erreurs manifestes ; quant à la confirmation que l’expérience leur peut apporter, elle ne saurait être que tout à fait partielle et limitée ; il saute aux yeux, en effet, que la simple existence d’un morceau d’acier aimanté est incompatible avec une telle électro dynamique ; et cette contradiction colossale n’a pas échappé à l’analyse de Hertz[1].

On pourrait peut-être penser que l’acceptation d’une théorie aussi litigieuse est nécessitée par l’absence de toute autre doctrine susceptible d’un fondement plus logique et d’une concordance plus exacte avec les faits. Il n’en est rien. Helmholtz a donné une théorie électro dynamique qui découle très logiquement des principes les mieux assis de la science électrique, dont la mise en équations est exempte des paralogismes trop fréquents dans l’œuvre de Maxwell, qui explique tous les faits dont rendent compte les équations de Hertz et de Maxwell, sans se heurter aux démentis que la réalité oppose brutalement à ces dernières ; la raison, on n’en saurait douter, exige que l’on préfère cette théorie ; mais l’imagination aime mieux jouer de l’élégant modèle algébrique façonné par Hertz et, à la même époque, par Heaviside et par Cohn. Très vite, l’usage de ce modèle s’est répandu parmi les esprits trop fai-

  1. H. Hertz : Untersuchungen über Ausbreitung der elektrischen Kraft, 2e Auflage, p. 240.