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quantité et qualité

§ IV. — La Physique purement quantitative.

Toutes les fois qu’un attribut est susceptible de mesure, qu’il est une quantité, le langage algébrique devient apte à exprimer les divers états de cet attribut. Cette aptitude à être parlé algébriquement est-elle particulière aux quantités et les qualités en sont-elles entièrement privées ? Les philosophes qui, au XVIIe siècle, ont créé la Physique mathématique l’ont certainement pensé. Dès lors, pour réaliser la Physique mathématique à laquelle ils aspiraient, ils ont dû exiger de leurs théories qu’elles considérassent exclusivement des quantités et que toute notion qualitative en fût rigoureusement bannie.

D’ailleurs, ces mêmes philosophes voyaient tous dans la théorie physique non point la représentation, mais l’explication des lois tirées de l’expérience ; les notions que cette théorie combinait en ses énoncés étaient, pour eux, non pas les signes et les symboles des propriétés sensibles, mais l’expression même de la réalité qui se cache sous ces apparences. L’Univers physique, que nos sens nous présentent comme un immense ensemble de qualités, devait donc s’offrir aux yeux de la raison comme un système de quantités.

Ces aspirations, communes à tous les grands réformateurs scientifiques qui inaugurèrent le xviie siècle, aboutirent à la création de la Philosophie cartésienne.

Chasser entièrement les qualités de l’étude des choses matérielles, c’est le but et comme la caractéristique de la Physique cartésienne.

Parmi les sciences, l’Arithmétique seule, avec