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déduction mathématique et théorie physique

complexe des théories physiques. Cette simplicité extrême a permis à M. Hadamard de pénétrer dans l’étude du problème assez avant pour mettre à nu l’inutilité physique absolue, irrémédiable, de certaines déductions mathématiques. Cette décevante conclusion ne se rencontrerait-elle pas dans une foule d’autres problèmes plus compliqués, s’il était possible d’en analyser d’assez près la solution ? La réponse à cette question ne paraît guère douteuse ; les progrès des sciences mathématiques nous prouveront sans doute qu’une foule de problèmes, bien définis pour le géomètre, perdent tout sens pour le physicien.

En voici un[1], qui est bien célèbre, et dont le rapprochement s’impose avec celui qu’a traité M. Hadamard.

Pour étudier les mouvements des astres qui composent le système solaire, les géomètres remplacent tous ces astres : soleil, planètes grosses ou petites, satellites, par des points matériels ; ils supposent que ces points s’attirent deux à deux proportionnellement au produit des masses du couple et en raison inverse du carré de la distance qui en sépare les deux éléments. L’étude du mouvement d’un semblable système est un problème beaucoup plus compliqué que celui dont nous avons parlé aux pages précédentes ; il est célèbre dans la science sous le nom de problème des n corps ; lors même que le nombre des corps soumis à leurs actions mutuelles est réduit à 3, le problème des trois corps demeure pour les géomètres une redoutable énigme.

Néanmoins, si l’on connaît à un instant donné, avec

  1. J. Hadamard : Loc. cit., p. 71.