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l’expérience de physique

donnée à la confiance qu’inspire tout un ensemble de théories.



§ V. — L’expérience de Physique est moins certaine, mais plus précise et plus détaillée que la constatation non scientifique d’un fait.

Le profane croit que le résultat d’une expérience scientifique se distingue de l’observation vulgaire par un plus haut degré de certitude ; il se trompe, car la relation d’une expérience de Physique n’a pas la certitude immédiate et relativement facile à contrôler du témoignage vulgaire et non scientifique. Moins certaine que ce dernier, elle a le pas sur lui parle nombre et la précision des détails qu’elle nous fait connaître ; là est sa véritable et essentielle supériorité.

Le témoignage ordinaire, celui qui rapporte un fait constaté par les procédés du sens commun et non par les méthodes scientifiques, ne peut guère être sûr qu’à la condition de n’être pas détaillé, de n’être pas minutieux, de prendre seulement le fait en gros, par ce qu’il a de plus saillant. Dans telle rue de la ville, vers telle heure, j’ai vu un cheval blanc ; voilà ce que je puis affirmer avec certitude ; peut-être, à cette affirmation générale, pourrai-je joindre quelque particularité qui, à l’exclusion des autres détails, aura attiré mon attention : une étrangeté de la posture du cheval, une pièce voyante de son harnais ; mais ne me pressez pas davantage de questions ; mes souvenirs se troubleraient ; mes réponses deviendraient vagues ; bientôt même je serais réduit à vous dire : je ne sais pas. Sauf