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la structure de la théorie physique

changer ? Il sera impossible de le savoir. Et inversement, si l’expérience réussit, croira-t-on avoir vérifié toutes ces hypothèses à la fois ? Croira-t-on, avec une seule équation, avoir déterminé plusieurs inconnues ? »

En particulier, la méthode purement inductive dont Newton a formulé les lois est donnée par beaucoup de physiciens comme la seule méthode qui permette d’exposer rationnellement la Science de la Nature : « La Science que nous ferons, dit Gustave Robin[1], ne sera qu’une combinaison d’inductions simples suggérées par l’expérience. Quant à ces inductions, nous les formulerons toujours en énoncés faciles à retenir, susceptibles de vérifications directes, ne perdant jamais de vue qu’une hypothèse ne peut pas être vérifiée par ses conséquences. » C’est cette méthode newtonienne qui est recommandée, sinon prescrite, à ceux qui ont mission d’exposer la Physique dans l’Enseignement secondaire. « Les procédés de la Physique mathématique, leur est-il dit[2], sont défectueux dans l’enseignement secondaire ; ils consistent à partir d’hypothèses ou de définitions posées a priori pour en tirer des déductions qui seront soumises au contrôle de l’expérience. Cette méthode peut convenir à la classe de Mathématiques spéciales ; on a le tort de l’appliquer actuellement dans les cours élémentaires, à la Mécanique, à l’Hydrostatique, à l’Optique. Remplaçons-la par la méthode inductive. »

Les discussions que nous avons développées ont éta-

  1. G. Robin : Œuvres scientifiques. Thermodynamique générale. Introduction, p. xii. Paris, 1901.
  2. Note sur une conférence de M. Joubert, inspecteur général de l’Enseignement secondaire. (L’Enseignement secondaire, 15 avril 1903.)