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la théorie physique et l’expérience

riable la pression que supporte le mélange gazeux, je considère la température absolue qui figure dans la formule et je la fais varier de 0 à + ∞.

Si, à cette opération mathématique, on veut attribuer un sens physique, on verra se dresser en foule les objections et les difficultés. Aucun thermomètre ne peut faire connaître les températures inférieures à une certaine limite, aucun ne peut déterminer les températures suffisamment élevées ; ce symbole que nous nommons température absolue ne peut, par les procédés de mesure dont nous disposons, être traduit en quelque chose qui ait un sens concret, à moins que sa valeur numérique ne demeure comprise entre un certain minimum et un certain maximum. D’ailleurs, aux températures suffisamment basses, cet autre symbole que la Thermodynamique nomme gaz parfait n’est plus l’image, même approchée, d’aucun gaz réel.

Ces difficultés, et bien d’autres qu’il serait trop long d’énumérer, s’évanouissent si l’on prend garde aux remarques que nous avons formulées. Dans la construction de la théorie, la discussion dont nous venons de parler n’est qu’un intermédiaire ; il n’est point juste de lui chercher un sens physique. C’est seulement lorsque cette discussion nous aura conduits à une série de propositions, que nous aurons à soumettre ces propositions au contrôle des faits ; alors, nous examinerons si, entre les limites où la température absolue peut se traduire en indications thermométriques concrètes, où l’idée de gaz parfait est à peu près réalisée par les fluides que nous observons, les conclusions de notre discussion s’accordent avec les résultats de l’expérience.