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LA COSMOLOGIE HELLÉNIQUE

sirènes chante une note, parfaitement pure et toujours la même ; de l’ensemble de ces notes résulte un céleste concert.

Certains Platoniciens pensaient que les distances indiquées au Timée correspondaient a des accords musicaux. Voici, en effet, ce que Macrohe écrit[1] au sujet de ces distances :

« Plusieurs personnes interprètent comme il suit ces expressions de Platon : La première partie est la monade. La seconde qui est, avons-nous dit, double de la première, est regardée par eux comme le nombre 2. La troisième est le nombre 3, qui est l’hémiole[2] de 2 et le triple de 1. La quatrième est le nombre 4, qui est le double de la seconde ou de 2. La cinquième est le nombre 9 qui est le triple de la troisième ou de 3. La sixième est le nombre 8 ; elle contient huit fois la première. Enfin la septième est le nombre 27, troisième puissance, nous l’avons dit, du premier nombre impair,

» Cette suite, on le voit aisément, procède par alternance régulière. Après la monade, qui est, à la fois, paire et impaire, vient le premier nombre pair, qui est 2 ; suit le premier impair, qui est 3 ; en quatrième lieu, nous trouvons le second pair, qui est 4 ; en cinquième lieu, le second impair qui est 9 ; en sixième lieu, le troisième nombre pair, qui est 8 ; en septième lieu, le troisième impair, qui est 27…

» Il fallait, d’ailleurs, qu’elle fut uniquement formée de nombres aptes à donner des accords parfaits, car elle avait pour mission d’assurer au Monde entier l’harmonieuse concorde. Or deux est le double d’un, et nous avons dit que, du nombre 2, naissait l’accord du diapason [l’octave]. 3 est à 2 dans le rapport d’hémiole ; et de ce rapport naît le diapentes [la quinte]. 4 est le nombre épitrite de 3 ; et de ce rapport est composé le diatessaron [la quarte]. Enfin 4 est quadruple de 1, et le rapport quadruple donne naissance au disdiapason [la double octave].

» Dès lors, l’Âme du Monde, qui communique au corps de l’Univers le mouvement que voient nos yeux, y produit aussi la musique créée par les nombres à l’aide desquels elle a été formée ; nécessairement, donc, par le mouvement qu’engendre son impulsion propre, elle donne naissance à des sons musicaux dont elle trouve

  1. Theodosii Ambrosii Macrobii Ex Cicerone in Somnium, Scipionis commentarius, lib. II, cap. II.
  2. C’est-à-dire la fraction ou la quinte.